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Théâtre La table monde

juillet 2005 | Le Matricule des Anges n°65 | par Laurence Cazaux

Est-ce que l’histoire réfute l’utopie ? C’est l’une des questions que pose Tankred Dorst dans son « Merlin », revisité façon très baroque.

C’est une aventure totalement démesurée dans laquelle s’est lancé Tankred Dorst. Une saga de plus de 250 pages, qui reprend la légende de Merlin, du roi Arthur, des chevaliers de la table ronde, en confrontant les personnages de cette légende avec des visions et des événements de notre monde d’aujourd’hui. Ce qui est particulièrement réjouissant, c’est la vitalité avec laquelle Dorst procède avec ses personnages. Ça crie, ça gueule, c’est énorme et souvent très drôle. Cette pièce constitue un véritable défi lancé aux metteurs en scène, car dans un nombre important de séquences il fait appel à la magie, au fantastique, aux scènes de guerre ou combats de dragons, bref, rien que du très banal… La liste des personnages, plus d’une cinquantaine, est impressionnante. A côté des « connus » comme Merlin, le Roi Arthur, Sire Lancelot du Lac ou la Reine Guenièvre, il y a également Dieu, les anges, le Diable, les dieux païens, mais encore par exemple, la mort, représentée par un acrobate chinois, ou encore les cent femmes dans la tour de Klingsor, l’indigne clique de Mordret, le fils d’Arthur, avec le catcheur aux dents de fer, l’avorton à face de singe, le dandy obèse à monocle…
La pièce alterne entre scènes dialoguées et séquences sous forme de récits. Comme par exemple le prologue : « Illuminé par mille ampoules électriques, le Christ chasse les dieux païens. Des éclairs déchirent le ciel. Hurlements. Cris stridents. Des projecteurs débusquent les dieux païens. De très haut, ils tombent dans l’obscurité. Ils s’enfuient dans les forêts, ils se cachent dans les villes. » Le style est donné d’emblée.Ensuite, la pièce se poursuit avec la naissance de Merlin. Une scène qui hurle et d’une grande drôlerie, puisque le père n’étant pas encore connu (il s’agit du Diable), tout le public est suspecté. Rothschild en personne, représenté parmi les spectateurs, refuse comme les autres la paternité. Merlin naît avec la barbe, les lunettes et lit le journal. Le Diable accourt pour voir son fils. Les confrontations entre le père et le fils seront toujours assez étonnantes, puisque la dispute entre les deux porte sur l’endroit du bien et du mal, l’impossibilité ou non de construire des utopies… La table ronde va devenir l’endroit majeur du conflit.
Le démarrage de la pièce est vraiment formidable. Après l’auteur semble plus prisonnier de la légende, même si l’œuvre reste énorme et foisonnante, avec des trouvailles superbes, comme cette crise du menuisier censé construire la table ronde : « Qu’elle passe par la porte ? Cette table ? Il te faut quoi encore ! Grande comme ça et passer par la porte ! Ça débarque et ça tient des discours sur une table et ça ne sait même pas ce que ça veut en faire ! Qu’elle passe par la porte ! Petite ! Grande ! Ronde ! Représentation du monde ! (…) Il faut qu’elle soit sacrée par-dessus le marché ».
Tankred Dorst a nommé sa pièce, Merlin ou la Terre dévastée. Il met face à face la société des hommes et le monde de la nature. Merlin étant, comme il le dit lui-même dans un entretien en annexe, un être de l’entre-deux. Tankred Dorst rajoute : « Merlin est le prototype du metteur en scène qui a l’imagination et la force nécessaires pour faire avancer les autres. Mais un problème moral se pose soudain : quelle est la bonne voie ? « Sois toi-même ! » Mais qui est ce « toi-même ? » Et s’il se révélait être un criminel ? (…) Dans Merlin il y a un fort scepticisme envers les utopies. Cependant je crois que sans utopie ou, pour dire les choses plus simplement, sans but dans l’existence, il est impossible de vivre. C’est déjà avec une petite utopie qu’on se lève le matin : on a pris rendez-vous, on prévoit un projet, un voyage. »
Et lorsqu’on lui pose la question de savoir si au-delà de ces petits projets, il y a des moments où l’on atteint le Graal, il répond : « Penser à soi-même sans effroi ».

Merlin ou la Terre
dévastée

Tankred Dorst
En collaboration avec Ursula Ehler
Traduit de l’allemand
par Hélène Mauler
et René Zahnd
L’Arche
272 pages, 16

La table monde Par Laurence Cazaux
Le Matricule des Anges n°65 , juillet 2005.