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Des plans sur la moquette Une autre sirène

juillet 2007 | Le Matricule des Anges n°85 | par Jacques Serena

Il y a toujours eu, ici ou là, de ces noyaux d’êtres un peu singuliers qui se sont connus, se sont reconnus, se sont aimés les uns les autres avant de l’être par le public. De ces êtres qui spontanément se sont attirés, se sont compris, ont partagé, échangé, se sont poussés les uns les autres vers ce que chacun pouvait devenir.
Dans un de ces noyaux qui s’est formé à un moment donné dans le Var, il y avait le futur acteur Charles Berling, bien avant qu’il se fasse happer par les plus grandes scènes nationales puis par le cinéma, il y avait également les futurs plasticiens Daniel Chaland et Serge Plagnol, avant que leurs œuvres ne soient exposées dans les musées, il y a eu moi, avant que mes textes ne soient publiés. Et il y avait aussi, parmi nous, la déjà divine Patricia Rebufa, bien avant qu’elle soit invitée aux quatre coins du monde pour créer ses fameuses recettes culinaires ou qu’elle en dévoile les secrets à la télévision. Et elle, Patricia, je me souviens, avait déjà des idées folles et extraordinaires, et là il faudrait séparer les deux parties du mot pour en tâcher d’en faire bien ressortir tout le sens : des idées extra-ordinaires.
Patricia, comme chacun de nous, alors, et peut-être elle encore plus que nous, avait en elle de ces projets qui semblaient trop extravagants, trop poétiques, presque utopiques, mais dont elle ne doutait pas une seconde qu’elle les ferait un jour entrer dans la réalité. Je me souviens surtout, bien sûr, qu’était déjà là son désir de couvrir son corps nu avec seulement des fleurs comestibles et quelques beaux végétaux, et puis de nous convier à nous délecter sur elle d’autant de pétales de capucines, de violettes et de feuilles de cresson que nous voudrions.
Si j’en parle là, c’est que je l’ai revue, cette Patricia Rebufa, elle a ressurgie il y a peu, pour lire un des mes textes au vernissage de mon exposition de photos à La Seyne. Nous avons parlé, bien sûr, et bu, évidemment, et j’ai vite compris que ces désirs d’alors étaient encore là, en elle, intacts, sinon même aggravés. Cette envie de faire se rejoindre de façon rituelle, sublimée, à peine transposée, le désir d’offrir aux regards une lente mise à nu alliée au plaisir d’offrir aux palais des mets subtils, rares et inusités. Le désir est toujours là, exacerbé, même si elle évoque aujourd’hui un essaim d’autres filles, si à l’entendre elles pourraient être un petit commando à débarquer dans une salle ou un jardin, au milieu des convives, pour s’offrir à déguster.
Ce désir têtu de Patricia Rebufa me plaît, bien sûr, et le mot est faible, son projet, à parler bien franc, me passionne terriblement, me hante carrément, comme un vieux rêve intime, persistant. Moi qui, dans mes pièces de théâtre, ai toujours cherché à réunir des gens autour d’événements purs, à ritualiser des événements à la fois adéquats et étranges, à l’aide de gestes ou de mots enfin vraiment adéquats, qui peuvent produire du bel étrange. Moi pour qui les tentatives théâtrales visaient surtout à ce que nous partagions ensemble du poétique, du trouble, de l’ambigu, du désir, de la gêne, de cette petite gêne subtile dans laquelle il y a au fond un plaisir rare, raffiné.
D’ailleurs, il se pourrait bien que j’aie déjà souvent écrit sur cette Patricia Rebufa. Elle pourrait être ici ou là dans mes romans, et même dans mes pièces, à peine travestie. Elle pourrait facilement être, par exemple, la cousine au bord du ruisseau, entre la folie et la sainteté, sans rire. Elle est en tout cas forcément une de mes « Fiévreuses », par ailleurs appelées Sirènes, de celles qui subsistent courageusement dans notre monde si peu fait, de moins en moins fait, pour ces natures-là.
Son projet, du reste, est une idée de sirène, c’est flagrant, comme un rêve faisable à plusieurs, et donc, fatalement, comme tout être qui a su conserver en lui une espèce rare de rêve, de désir et de sensibilité, lié à une certaine conscience sur le sens de la vie et du temps, j’y adhère corps et âme. Et j’entends bien faire tout mon possible pour que cette sorte de rêve vienne s’inscrire sans trop tarder dans la grise réalité, dans le lugubre cauchemar d’aujourd’hui. Je le dis ici tout net, il y aura des suites.

Une autre sirène Par Jacques Serena
Le Matricule des Anges n°85 , juillet 2007.
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