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janvier 2010 | Le Matricule des Anges n°109 | par Anthony Dufraisse

Chronique d’un déclassement annoncé, ce récit drolatico-tragique de Marcel Astruc nous révèle un écrivain attachant.

Connaissez-vous Marcel As- truc ? Il y a de fortes chances que non. Autant le fils Alexandre nous est connu, autant le père… Car Marcel Astruc est le père du cinéaste. Né à Paris en 1886 et mort en 1979, il s’invite très jeune dans le milieu littéraire. Toutefois c’est dans le journalisme, au cours des années 30, qu’il se taille une solide réputation. C’est à peu près tout ce que nous apprend la postface un peu light de Jean José Marchand, à l’origine de cette publication. Dommage, on aurait aimé en savoir un peu plus sur l’homme. Toujours est-il que Trois mois payés, roman publié en 1930 à l’enseigne du Tambourin, est une véritable redécouverte à défaut d’être une pure merveille. L’histoire est simple : dans la France de la crise de 1929, un jeune homme perd du jour au lendemain son travail d’employé aux écritures et se retrouve avec trois mois de salaire devant lui ; de quoi voir venir. Du moins c’est ce qu’il pense. En vérité, la dèche l’attend au tournant. C’est là tout l’argument d’un livre assez remarquable d’intelligence et de sensibilité.
Au départ, ce garçon de bureau semble décidé à acquérir une dignité professionnelle qu’on lui refusait jusqu’alors. Un mal pour un bien, ce licenciement ? Le jeune homme se l’imagine. C’est compter sans la crise qui s’éternise. « Successivement toutes les issues par où j’entrevoyais une voie possible se refermaient devant moi. » Désinvolture ou vanité, il commet impair sur impair. Qu’on ajoute à cela de mauvaises rencontres, et on comprendra quelles affres s’abattent sur ce garçon naïf. Impasse et poisse : « Le problème de l’existence se présentait à mon cerveau sous la forme d’une interrogation obsédante. Que faire, où aller ? Il me semblait toujours qu’il devait y avoir une solution, qu’à force de chercher je la découvrirais (…) ; en vain, la vie indifférente poursuivait à droite et à gauche de ma route son cours par lequel je ne trouvais pas le moyen de me laisser entraîner ». C’est dans l’amertume et le désenchantement, mais sans colère ni fureur, que Marcel Astruc fait évoluer son personnage : « Je me demandais avec angoisse si, seul de tous les hommes, j’étais définitivement incapable de me créer une vie ».
Témoignage estimable sur le Paname de l’époque, c’est aussi, la postface le souligne à raison, un texte qui « reflète les craintes et les velléités d’une classe moyenne désemparée ». Pour autant n’y voyez pas un documentaire ; c’est bien un récit dicté de l’intérieur, au long duquel le narrateur-personnage oppose au décompte des jours et à l’érosion continue de sa condition, une volonté de girouette. Un récit composé à hauteur d’homme. Et même « à ras d’homme », aurait dit Henri Calet auquel ce livre fait par moments penser. C’est avec un ton pince-sans-rire que Marcel Astruc écrit cette chronique du déclassement social dont la rue, une modeste chambre et quelques cafés sont tour à tour les décors privilégiés. Cet humour à froid allège ce que le propos pourrait avoir de vraiment pathétique. Comme un élève appliqué, le narrateur raconte avec un égal sérieux l’essentiel et l’accessoire de sa pénible situation, ses petits malheurs et ses grands soucis ; l’effet saugrenu que produit cette monotonie n’en est que plus vif. Dans un style sobre, Astruc dit le désœuvrement, la peur de l’indigence et du dénuement, le quotidien gris et la torpeur ordinaire d’une existence qui va comme elle peut, qui, à la fin, tient juste à quelques riens. Le mélange de cocasserie et de tristesse fait toute la réussite de ce livre, certainement pas un chef-d’œuvre, mais qui donne envie de lire autre chose de Monsieur Astruc Père.

Trois mois payés de Marcel Astruc
Le Dilettante, 221 pages, 17

Pour solde de tout compte Par Anthony Dufraisse
Le Matricule des Anges n°109 , janvier 2010.
LMDA papier n°109
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