Il rêve d’un grand musée de l’imprimerie à Strasbourg. Souhaite la suppression du Parlement européen, lequel « empêche de penser réellement l’Europe ». Regrette le confinement de la littérature « indigène » en librairies. Dénonce la concurrence déloyale dans le marché de l’édition. Armand Peter, c’est un peu le râleur de service. L’empêcheur de tourner en rond. Avec un sens de l’ironie et de la convivialité. Avant Noël, l’homme fêtait les trente ans de sa maison d’édition, BF, créée en… 1976. « Mon chiffre d’affaires ? C’est 130 livres parus… », sourit-il. En français, en allemand, ou en dialecte. Des romans, des essais, de la poésie, qui ont un lien avec l’Alsace ou avec sa chère Mitteleuropa. Des noms ? André Weckmann, Michel Deutsch, Jean-Paul Klée, Danilo Kis, Conrad Winter, Barbara Honigmann, Gaston Jung. Au départ, BF était une revue critique et satirique, Budder Flade (tartine beurrée en alsacien). « Nous participions à ce mouvement régionaliste de contestation, initié par les écologistes. Nous réclamions la prise en compte des cultures régionales, comme le retour au bilinguisme. Il y avait des écrivains, des poètes, des chanteurs. Tout le monde rêvait de Paris… Une structure d’édition manquait. »
Un constat, trente-quatre ans plus tard : « Le problème d’un éditeur, ce n’est pas éditer, mais vendre, diffuser. » Alors il lance des souscriptions, multiplie les salons. « Je suis un artisan du livre, pas un professionnel », dit cet inlassable mémorialiste de l’Alsace, en charge de la culture et du patrimoine à la Ville de Schiltigheim. Pour commenter le 20e anniversaire de la chute du Mur, il y a invité des Berlinois, et « non des Parisiens, comme à Strasbourg ».
Strasbourg Une autre Alsace
février 2010 | Le Matricule des Anges n°110
| par
Philippe Savary