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Domaine étranger Rien n’est acquis

avril 2010 | Le Matricule des Anges n°112 | par Lucie Clair

Dans une série de saynètes du quotidien, James Lasdun saisit au vol le moment de bascule d’une vie.

Joseph a encouragé sa femme à investir en bourse le petit héritage qu’elle a reçu. Le maigre capital est en train de fondre sous ses yeux, sans recours - et peu à peu, c’est « la gestion de son sens tout entier de la réalité qui semblait inféodée à l’état des marchés », jusqu’à lui faire perdre tout sens des proportions lorsque sa fille disparaît au cours d’un séjour à Cape Code (« Un homme inquiet »). Abel est en voyage avec Stewart en Grèce pour rédiger un guide touristique - l’érotisme flamboyant de son compagnon le déstabilise et le conduit à « considérer sa conception de l’existence, pourtant adoptée en toute conscience, comme insolite, voire monstrueuse. Il se demanda pour la première fois si sa fidélité d’époux résultait d’un choix délibéré ou d’une acceptation passive » (« L’ordre naturel »). Un diagnostic pendant de cancer engage Richard à revisiter l’intégralité de ses choix et les raisons du conflit qui l’oppose à sa sœur (« L’inestimable geste de vie »).
« et tout ce que nous désirons, c’est nous rendormir ».
Ce sont ces moments où Ça commence à faire mal que James Lasdun épingle au fil de quinze nouvelles portées par une plume précise, des dialogues vifs et un soin particulier à planter les ambiances, les décors, les lumières - une sensibilité particulière à la force du monde qui nous entoure et nous pénètre - pour identifier les entrelacs des cheminements de l’esprit humain. Il est versatile, incapable de se fixer - sauf dans l’obsession (« Ça commence à faire mal ») ; constamment soumis aux doutes et aux constructions - angoissantes ou rassurantes. Terreau des illusions, forgées pour conserver un léger décalage face à la réalité, lorsque celle-ci commence à nous atteindre, et à blesser l’image de soi, entraver la maîtrise d’une situation, les projets auxquels on a cru - « parce que (…), nous sommes déjà épuisés par notre petite prise de conscience, et tout ce que nous désirons, c’est nous rendormir… » (« Une histoire bourgeoise »). Rien n’est acquis dans ce tourbillon de pensées qui se chevauchent, s’interdisent, se contredisent, cessent d’être valides avant même d’avoir été entièrement formulées. Rien n’est stable au fond de l’être humain, pas même le désir. Et l’on ne peut pas croire à ses propres intentions, tant elles sont conduites par des facteurs sous-jacents qui nous échappent. Reste pour quelques-uns l’issue d’une « certaine résignation en même temps que le reflet d’une satisfaction, une acceptation d’un état de fait » (« Oh, mort ! ») - qui vaut bien la résistance qu’opposent d’autres à toute forme de compréhension de ces phénomènes, se contentant de les vivre « dans une sorte d’effondrement à retardement, comme celui d’un immeuble qui se serait tenu debout par la seule habitude de la verticalité malgré le pourrissement de ses piliers de soutènement » (« Cranley Meadows »).
Pointilliste, James Lasdun travaille les interstices de ces engrenages de l’esprit, qui produisent ensuite nos actes, révèle leur extrême fragilité - leur capacité à « se dissoudre dans quelque solution corrosive » (« Citron mariné »), leur dualité et duplicité, « comme si la rencontre entre le souhait et la réalité était, tout compte fait, une expérience aussi proche de la douleur que du plaisir » (« Mignonne ») et l’ambiguïté avec laquelle on les accueille lorsqu’ils se dévoilent.
Poète et romancier primé en Angleterre où il est né en 1958, l’auteur a migré aux États-Unis où il enseigne à New York et Columbia. Ses deux romans (L’Homme licorne, 2004 et Sept mensonges, 2007) sont traduits chez Gallimard.

Ça commence à faire mal de James Lasdun
Traduit de l’anglais (États-Unis) par Pierre Charras
Éditions Jacqueline Chambon, 286 pages, 21,80

Rien n’est acquis Par Lucie Clair
Le Matricule des Anges n°112 , avril 2010.
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