Classique de la littérature néo-zélandaise, Seul nous fait découvrir le destin d’un Anglais combattant de la Première Guerre mondiale, qui les hostilités terminées, part pour la Nouvelle-Zélande. Convaincu que c’est un « pays agréable et riche », l’Angliche, comme on le surnomme, va subir quelques déconvenues. La crise économique commence à faire des ravages. Les fermes sont hypothéquées, et c’est à peine si la main-d’œuvre est rémunérée.
John Mulgan, né en 1911, virulent opposant au conservatisme britannique de l’entre-deux-guerres, dresse un tableau sombre des effets de la déshumanisation et de l’injustice dans une société en crise. Mais son personnage, Johnson, n’a rien d’un homme engagé. Ce qu’il veut, c’est se sentir libre… Il sera embauché dans des fermes. Il travaillera à la construction de voies ferrées, de routes. Les tâches sont ingrates, sous la pluie, dans le froid et la gadoue. Johnson participera aux émeutes d’Auckland mais il ne se sent pas impliqué. Un effet de distance et d’étrangeté parcourt le roman, qui s’accentue encore après la rencontre de Johnson avec Stenning, un fermier taciturne. Une estime réciproque s’installe entre les deux hommes unis dans un combat acharné contre une terre hostile. Mais Stenning vit avec Rua, jeune femme d’origine Maori qui finira par séduire Johnson. Les deux rivaux en viendront à se battre et dans cet affrontement pathétique, Johnson tuera Stenning. Commence alors pour lui une fuite épique à travers les montagnes des Kaimanowas. Il y vivra en Robinson, menant une existence léthargique, s’adaptant à une nature pourtant cruelle. Retourner dans le monde de ses semblables lui fait peur. Il prendra pourtant cette décision et rejoindra l’Angleterre. Là, cet homme jusqu’alors solitaire, éprouvera enfin une sensation d’apaisement en s’engageant aux côtés des Républicains espagnols : « C’est une bonne sensation. En règle générale on passe trop de temps tout seul ».
Yves Le Gall
Seul
de John Mulgan
Traduit de l’anglais (Nouvelle-Zélande) par Pierre Furlan
Esperluète éditions, 224 pages, 18 €
Domaine étranger Seul
octobre 2011 | Le Matricule des Anges n°127
| par
Yves Le Gall
Un livre
Par
Yves Le Gall
Le Matricule des Anges n°127
, octobre 2011.