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Théâtre Les surrurouillés

mai 2013 | Le Matricule des Anges n°143 | par Laurence Cazaux

Deux pièces sur la précarité sociale et existentielle, par Claudine Galéa, Grand Prix de littérature dramatique en 2011.

Après grand, c’est comment ?

Les Invisibles se déroule sur trois années. Ils sont quatre : le Vieux, la Vieille, le Fils et la Fille. Quatre à distribuer les prospectus dans les BAL (Boîtes Aux Lettres) « Aujourd’hui le lot 200 journaux + 186 journaux qui ne sont pas attachés Autre lot 300 + 86 Trois autres 100 + 86 Jour de petite tournée Petite tournée on distribue dans 386 BAL Grosse tournée dans 1600 Ici tout le monde préfère les grosses HÉ HO ».
Ces quatre invisibles travaillent tout le temps et n’arrivent pourtant pas à survivre. Ils s’épuisent, leurs pensées commencent à déraper. La première année se termine par un diagnostic d’ « ALERTE RISQUE GRAVE ». La deuxième par une « ALERTE RISQUE DÉPASSÉ ». La troisième, une fois que la fille est débauchée, (« Vos qualités performatives se sont déplacées et chez nous elles ne trouvent plus à s’exprimer correctement » lui annonce une voix enregistrée), la rage tenaille son corps qu’elle veut transformer en bombe. En proie à la colère, au désespoir, à l’épuisement, à la révolte et à l’humiliation, les quatre partent en voiture. Il n’est pas précisé s’ils réalisent un rêve fou de voyage en Roumanie, ou s’ils vont s’exploser avec leur voiture, une manière d’échapper à ce système qui broie les corps et les âmes.
Dès le début de cette pièce, les quatre n’arrivent plus vraiment à penser. Et contaminent le lecteur qui se met à douter. Comme par exemple avec LeGarçon. Un personnage dont on nous indique qu’il est joué par la Vieille et qui apparaît seulement pendant des scènes avec elle. On se demande s’il n’est pas un enfant imaginaire, comme une revanche sur l’existence, qui serait épargné par toute cette misère et pourrait tranquillement continuer à faire ses études. Mais rien de certain !
Claudine Galéa nous livre là une matière textuelle très dense et ouverte. Qui laisse beaucoup de place à ceux qui vont la mettre en bouche, avec un travail quasi musical, deux scènes pouvant légèrement se superposer par exemple. Et toute une distribution à faire. Les répliques, séparées par un slash, ne sont pas distribuées. Claudine Galéa nous prévient : « Les slash n’indiquent pas nécessairement un changement de locuteur. Plusieurs phrases peuvent être dites par l’un ou l’autre des personnages. On organisera la répartition selon de projet de mise en scène. Dans tous les cas, l’obsession et l’implosion font partie du jeu. »
La langue est obsessionnelle en effet. Il n’y a aucun signe de ponctuation, comme s’il n’y avait aucune possibilité de respiration. Ainsi, au début de la pièce, la fille, encore au chômage, se livre : « Il n’y a pas de travail Je suis grosse Ce n’est pas la question Il n’y a pas de travail Je suis moche Ce n’est pas la question Il n’y a pas de travail Il n’y a pas de travail pour vous mademoiselle Pour personne Je suis une Je suis rien Personne Vingt kilos deux années Deux années sans travail LE CORPS DU TRAVAIL C’EST MON CORPS Je produis en quantité J’ai un surplus de marchandises Je fais des bénéfices MON CORPS PROFITE J’ai des heures supplémentaires de graisse ».
C’est une très belle partition, une polyphonie cruelle qui raconte bien une réalité du monde du travail. Une pièce qui donne tout de suite envie de la tester en lecture à voix haute.
Le second texte Après Grand c’est comment ? raconte l’histoire d’un petit gars Titus, qui refuse de parler et de s’agiter partout. Qui préfère rêver. Qui parle « aux nuages aux tables aux chaises à l’herbe à la lune ». Qui dit « bonjour au chemin qui va à l’école ». Qui salue les arbres. Et qui inquiète les grands. Mais pour lui, les grands sont « serrurouillés  ». « Leur bouche a mangé leurs oreilles Et leurs yeux Et leurs mains Et leur cœur Et leur temps ». Ce temps qu’on ne prend plus à « soleiller  » ni lézarder. « Il est passé où le Temps ? Après Petit c’est Grand ? Et après Grand ? » Bonne question.

Laurence Cazaux

Claudine Galéa
Les Invisibles
Éditions Espaces 34, 72 pages, 12,80
et Après Grand c’est comment ?
Éditions Espaces 34, théâtre jeunesse, 42 pages, 6,80

Les surrurouillés Par Laurence Cazaux
Le Matricule des Anges n°143 , mai 2013.
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