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Domaine français Petit Poucet rêveur

janvier 2016 | Le Matricule des Anges n°169 | par Dominique Aussenac

Intranquillement serein, lumineux, presque solaire, un livre d’heures offert par le Suisse Jean Prod’Hom.

Les êtres qui aiment la pluie, les paysages détrempés interpellent et fascinent. Dans le chaos des temps, marcheurs infatigables, ils perçoivent la beauté dans des détails infimes, des brindilles fragiles, de petits cailloux incongrus… Tessons (d’autre part, 2014), le premier ouvrage de Jean Prod’Hom apparaissait comme une maison des muses, mosaïque constituée de brimborions, éclats de vaisselle, poterie collectés de par le monde. Fragments de fracas, révélant le passage des temps, la patine, l’érosion, la lenteur, la transmission, le dérisoire, l’éphémère continuum de la vie, des hommes, des civilisations. Les textes de Marges proviennent d’un autre éclatement, un autre entoilement, du « blogue » lesmarges.net que nourrit le quinquagénaire, depuis 2008. Journal intime, carnet de pérégrinations à travers lequel l’auteur se dilue dans l’observation poétique, philosophique, parfois un tantinet sarcastique d’un quotidien aussi prosaïque qu’universel. En exergue à chaque texte, une photographie du natif de Lausanne entre en écho. Depuis 2015, ces écrits adressés à un Cher Pierre, engendrent une correspondance avec un autre natif, d’un pays de pluie, le Briviste Pierre Bergounioux. D’autres écrivains balisent les chemins de traverse de Jean Prod’hom : Jaccottet, Ramuz, Quignard, Trassard, Calet, on pourrait y rajouter André Dhôtel…
Avec une soif inextinguible de réenchanter le monde, de s’émerveiller du si peu, Prod’Hom introduit un rapport au temps, singulier. Sorte d’éloge de la lenteur, volonté de vivre son rythme propre, de se dégager de l’artifice. Écrire, apparaît non pas comme une façon de mettre les mots au pas, mais de retrouver dans leur alignement, la scansion de la marche, tout en exaltant son caractère erratique. De longues phrases en volutes, de courts paragraphes ponctués de silence engendrent un style d’une grande fluidité. Il aime à égrener les noms de lieux, qui se mettent à résonner, entre exotisme pastoral et mythe alpin : La Moille au blanc, La côte de la Mussily, le chemin des Meilleries, la Corbassière de la Possession… « Je quitte le Riau en longeant les plans du jour et du ciel, passe à côté, pas moyen de faire autrement, à moins d’aller droit à l’est, là où sommeille le gibier, où règnent les cols et les passes, l’herbe maigre, les pierres, les sentes sur lesquelles on revient parfois, quelques cairns. »
Les territoires de l’enfance sont ainsi sillonnés. Dans le texte inaugural, il stigmatise le peu de confiance que l’école et la maison ont inoculé en lui. Pire les compositions écrites où on lui demandait d’être original. Il en aurait pu être autrement ? évoque le rapport magique qu’il entretint avec les événements. Il se croit responsable du fait de sa présence au stade, de la défaite de son club de foot de prédilection, le Lausanne-Sport. «  Je ne suis pas guéri. Je me surprends parfois à calculer les effets du sacrifice sur le réel, j’aurais pu si souvent infléchir le cours des choses.  » Il y a aussi ses rejetons qui enjambent les rites de passage avec une facilité déconcertante et suivent déjà d’autres chemins ou encore les enfants à qui il enseigne. Des portraits à la manière des Caractères de La Bruyère tel Jean-Rémi, tapi dans son antre, il fait fuir les oiseaux. Des rencontres. Dans Sésame, celle d’un inconnu, croisé sur un plateau enneigé, en pleine tempête et à qui il confie les clés de sa voiture. « On ne s’est pas revu, on ne se reverra pas, les vies parfois se croisent et leurs pas s’emboîtent comme les dents d’une fermeture-éclair, ils font tenir ensemble quelque chose avant quoi et après quoi il n’y a qu’un tapis blanc. » On reste coi, presque jaloux, devant tant de propension au bonheur, de clarté et de grâce.
Dominique Aussenac

MARGES
DE JEAN PROD’HOM
Postface de François Bon,
Traces du temps, 168 pages, 27

Petit Poucet rêveur Par Dominique Aussenac
Le Matricule des Anges n°169 , janvier 2016.
LMDA papier n°169
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