Les choses sont allées vite. Après les appels à protester contre l’arrestation et la détention d’Aslı Erdoğan en août dernier, il est apparu pour certains qu’il fallait répondre à la répression d’Ankara par la littérature elle-même. Ils ont été quelques-uns à s’engager dans un combat qu’on aurait pensé d’une autre époque : ouvrir les portes d’une prison par le seul fait de lire ici, là et partout où c’était possible des textes de l’auteur emprisonné. Parmi eux, Tieri Briet : après avoir été éditeur, l’homme se consacre depuis quelques années à l’écriture. Fixer le ciel au mur paraît en 2014 aux éditions du Rouergue dans la collection « La Brune » et tente, par la littérature, de prendre en charge la souffrance d’une fille anorexique et de son père. Un autre livre est en cours autour de l’aventure d’être père : Par le ventre des femmes. Écrivain résolument engagé, Tieri Briet travaille auprès de familles Roms (un autre ouvrage est en cours d’achèvement, tiré de cette expérience d’amitié : En cherchant refuge, nous n’avons traversé que l’exil). À la mi-décembre, apprenant que le procès d’Aslı Erdoğan s’ouvrait le 29 du mois, il lance l’idée d’aller à Istanbul soutenir l’écrivaine turque en apportant des textes écrits pour elle par d’autres écrivains. Arrivé avec une poignée d’autres Français sur place deux jours avant l’ouverture du procès, Tieri Briet a accepté d’en suivre pour nous le déroulement du procès au jour le jour et de rendre compte de ce qu’il a vu à Istanbul. L’homme poursuit son combat sur son blog, uncahierrouge.net et auprès de la revue électronique Kedistan.net. À suivre, donc…
Mardi 27 décembre
Tieri Briet, vous venez d’arriver en Turquie pour apporter votre soutien à Aslı Erdoğan. Comment en êtes-vous venu à faire cette démarche ? Combien êtes-vous sur place et pourquoi vous êtes-vous ainsi mobilisés pour la romancière turque (que représente-t-elle pour vous ?) ?
L’idée d’un voyage de soutien est née à la Maison de la poésie, le 12 décembre à Paris, après une soirée de solidarité avec Aslı Erdoğan, organisée par la comédienne Sophie Bourel. Ce jour-là, nous avons atteint l’amplitude maximale d’une mobilisation qui n’a jamais cessé depuis, suite à un premier appel lancé à la mi-novembre avec un vieux compañero, Ricardo Montserrat. Le déclencheur de cet appel était une brève de l’AFP qu’on aurait pu laisser passer comme tant d’infos désespérantes ces derniers temps : en Turquie, des procureurs d’Istanbul avaient demandé la prison à vie contre une romancière encore peu connue en France, dont Actes Sud avait traduit quatre livres qu’on ne peut pas oublier, quand on a pris le temps d’en lire seulement les premières pages. Dans l’écriture d’Aslı Erdoğan, l’impact des images était tel que nous avons eu l’idée, Ricardo et moi, de lancer un appel à lire partout où c’est possible les textes d’Aslı. En faisant le pari que la puissance de ses images, les thèmes de l’exil et de...
Dossier
Asli Erdogan
Journal d’un combat
Décidés à venir défendre la liberté d’expression et arracher Aslı Erdoğan à la prison, une poignée de Français à l’initiative notamment des écrivains Tieri Briet et Ricardo Montserrat ont fait le déplacement à Istanbul. Pour rendre compte, aussi.