Camille a 15 ans. Elle est au collège en quatrième et se décrit comme étant « observatrice, discrète, timide, gourmande, gentille attentionnée, studieuse, ponctuelle ». Elle a une amie, et aime Loïc dont elle espère faire son amoureux. Une petite fille modèle en quelque sorte. Sa mère, prévenante, soucieuse, se préoccupe beaucoup de sa fille, surtout de son alimentation. Et puis il y a La Bande : des filles et des garçons qui ont choisi Camille comme bouc-émissaire. Probablement parce qu’elle ne sait pas se défendre, parce qu’elle est un peu à part : « Un jour, j’aimerais voir ça. Le Pacifique. La grande barrière de corail. Les vagues qui font de beaux rouleaux, comme ça. D’un bleu… » Et la situation ne fait que s’aggraver. La Bande devient de plus en plus menaçante, insulte Camille, utilise tous les moyens qu’offrent les réseaux sociaux pour la ridiculiser, menaçant même de la tuer. Camille se tait et souffre en silence. Les adultes ne voient rien ou ne veulent pas voir, l’établissement scolaire veille à sa réputation, sa mère se désole de la voir ne plus manger et maigrir. Et puis parallèlement, Axel Lorette nous raconte l’histoire d’une truie, née dans un élevage et gavée jusqu’à n’en plus pouvoir. Elle va se battre contre ses congénères, se montrer plus forte qu’elles et finalement gagner sa place pour être la première à l’abattoir. Et cette comparaison nous donne une clé du destin de Camille : voilà ce qu’elle ne veut pas vivre, cet engraissement, cette vie toute tracée, cette place à prendre au milieu du troupeau. Ne pas vouloir être comme les autres, c’est peut-être cela que la bande ne lui pardonne pas. Ne pas se gaver et se lamenter ensuite d’être trop grosse, ne pas se maquiller pour être la plus séduisante et n’être qu’un objet destiné à séduire avant de mourir. Camille s’accroche à ses rêves, et préférera mettre fin à l’aventure plutôt que de se soumettre. Les adultes constateront dans son carnet secret que les choses ne dataient pas d’hier, mais rien ne viendra déranger leurs certitudes. « Quand je serai grande, je voudrais être journaliste, pour dire aux gens ce qui se passe vraiment dans le monde. »
P. G.-B.
Mouton noir d’Axel Lorette
Lansman éditeur, 82 pages, 12 €
Théâtre Mouton noir
mai 2017 | Le Matricule des Anges n°183
| par
Patrick Gay Bellile
Un livre
Le Matricule des Anges n°183
, mai 2017.