Le succès de Trainspotting et la faveur accordée à ses quatre antihéros conduisent Irvine Welsh à fouiller le filon sans faiblir. Il est pourtant hasardeux de compter sur les mêmes recettes et ficelles pour aligner les romans cousus de péripéties, de drames et de rebondissements. L’Artiste au couteau ne faillit pas à sa mission.
L’insupportable Begbie, autrefois « dépendant à la violence », s’est rangé : marié avec Melanie, spécialiste de l’art-thérapie rencontrée en prison, deux filles, une villa près de la mer en Californie. De la frustration, il est passé à « l’ivresse de la connaissance », et sous le nom de Jim Francis, le voici peintre et sculpteur. Artiste d’un certain renom, il paraît à l’abri de son passé sordide. Ce serait compter sans la diabolique imagination de son créateur.
L’un de ses fils, nés d’une première liaison sordide, qu’il ne connaissait plus depuis longtemps, est assassiné. Retournant en Écosse, il prend le chemin tortueux des retours en arrière sur sa vie de loser délinquant, mais aussi de la vengeance. Là il retrouve un monde où « les gens se chargent de leur propre élimination ». Il espérait que « le conte de fées qu’était sa vie, cette ascension du caniveau à une relative richesse, soit une source d’inspiration pour ses fils ». Peine perdue, la came, l’alcool et le banditisme ont eu raison d’eux. L’explosion meurtrière rencontrera le fratricide…
Comme à son habitude, Irvine Welsh mène son intrigue à la baïonnette, agitant un vocabulaire divers selon les classes sociales de ses personnages, jusqu’aux plus lourdes vulgarités. Ainsi les univers contrastés permettent une opposition bienvenue. Qui est Jim Francis Begbie ? L’artiste bien sous tous rapports qu’il a su devenir, ou le monstre de violence qu’il porte encore au fond de lui ? Divertissement proche du polar ou roman de société sagace, telle est la question…
Thierry Guinhut
L’Artiste au couteau d’Irvine Welsh
Traduit de l’anglais (Écosse) par Diniz Galhos,
Au diable vauvert, 480 pages, 22 €
Domaine étranger L' Artiste au couteau
mai 2018 | Le Matricule des Anges n°193
| par
Thierry Guinhut
Un livre
Par
Thierry Guinhut
Le Matricule des Anges n°193
, mai 2018.