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Domaine français Au cabaret des oiseaux

février 2019 | Le Matricule des Anges n°200 | par Dominique Aussenac

Un petit tour de Suisse en Novembre  : une écriture pleine, lumineuse, déliée, pour l’habitant du Haut-Jorat, Jean Prod’Hom.

Onzième fragment d’année, novembre développe une dimension crépusculaire. Neuvième et dernier mois chez les Romains, il durait soixante et un jours, figurait le repos de la terre et générait une trêve dans les conflits militaires. Jean Prod’Hom, qui pendant trente ans fut prof dans un collège suisse, prend sa retraite. « J’eus alors le sentiment étrange qu’une vie – ou ce qui subsiste lorsqu’on en retire les bavardages et les convenances – se résumait à une seule phrase. Et cette phrase commencée par le “oui” de l’enfant que je fus, je souhaitais la reprendre en l’état où je l’avais laissée, et la prolonger aussi longtemps que mes forces me le permettraient. » Prod’Hom a au moins trois passions. L’écriture – il tient un blog quotidien depuis 2008, lesmarges.net d’où sont nées les riches heures de Marges (Antipodes, 2015), son deuxième ouvrage. La collecte de brimborions, petits riens fragiles, érodés par le sel, fragments de vaisselles trouvés en bords de mer, évoqués dans Tessons (D’autre part, 2014). Enfin la marche – qui permet de tout combiner en privilégiant lenteur, rêverie, observation, contact direct à la nature, rencontres de toutes sortes.
Il nous entraîne ici dans la région du Plateau suisse dite des Trois Lacs du côté de Neuchâtel, région viticole assez peuplée, dans ce qui peut être tout à la fois un carnet de voyage, une lecture de paysages, une randonnée métaphysique, un hommage, discret forcément, au génie helvétique. « Je n’ai donc pas pris la direction du sud où l’homme rêve son avenir et dresse le décor des lendemains qui chantent, mais une fois encore celle de ces terres du Nord que les hommes ont souvent désertées, là où le présent bégaie, l’avenir hésite et le passé s’attarde comme un point d’orgue. » On l’appelle aussi le pays des âmes. Et la première évoquée va bientôt s’éteindre. Celle d’un vieux solitaire qui finit sa vie dans une maison de retraite où seul Prod’hom le visite et échange des livres et quelques propos. « J’admirais sa capacité à se satisfaire du quotidien, avec une juste distance qui paradoxalement lui permettait de participer au monde sans le toucher. » La pensée de la mort accompagnera ses pas. Art de vivre et art de mourir, un même cycle, une même roue ! Toutefois les chardonnerets d’un François d’Assises chasseront rapidement l’évocation des derniers moments de saint Augustin. Piaillements, éclairs rouges, jaunes, noirs, blancs, le furtif, le fragile chantent le vivant. D’autres animaux seront croisés, renards, chevreuils, chamois… Mais aussi des sites plus quelconques, industriels : Prod’Hom s’interroge, s’émeut, s’émerveille, raconte le paysage, décrit ces lacs qui ont vu s’installer les premiers hommes, petit à petit comblés, drainés, régulés par des communautés de gueux, de mal nés dans des colonies disciplinaires. Il visite tour à tour une cimenterie, un zoo, disserte, met en relation, fait référence, se souvient du cinéaste Alain Tanner et de son film Le Milieu du monde, évoque l’ethnologue Alfred Métraux, sa vie au contact de tribus indiennes aujourd’hui disparues et surtout sa mort, suicidé au gardénal. « Il enregistra sur un carnet, tant qu’il en eut la force et la lucidité, les étapes de son intoxication. »
Prod’Hom invite aussi toute une galerie de personnages. Des très humbles. Ces logeurs qui l’accueillent pour une nuit lors de la douzaine d’étapes du périple et qui en quelques mots, anecdotes pudiques racontent une vie, une manière d’être au monde. Des gloires locales, un brin empesées, entrepreneurs, pasteurs, collectionneurs, ayant façonné le pays… Ces écrivains qui l’inspirent : Jean-Christophe Bailly, Pierre Bergounioux, W.G. Sebald, Henry David Thoreau, Robert Walser… avec qui il partage le goût des leçons de choses, des pommes un peu acides ou farineuses, une écriture fascinante tout en volutes, allant à l’essentiel et louant la liberté, l’humanité, la beauté du monde…

Dominique Aussenac

Novembre, de Jean Prod’hom
D’autre part, 320 pages, 25

Au cabaret des oiseaux Par Dominique Aussenac
Le Matricule des Anges n°200 , février 2019.
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