La lettre de diffusion

Votre panier

Le panier est vide.

Nous contacter

Le Matricule des Anges
ZA Loup à Loup 83570 Cotignac
tel ‭04 94 80 99 64‬
lmda@lmda.net

Connectez-vous avec les anges

Vous n'êtes actuellement pas identifié. Pour pouvoir commander un numéro, un abonnement ou bien profiter, en tant qu'abonné, des archives en ligne, vous devez vous connecter avec votre compte.

Retrouver un compte

Vous avez un compte mais vous ne souvenez plus du mot de passe ? Vous êtes abonné-e mais vous vous connectez pour la première fois ? Vous avez déjà créé un compte, peut-être, vous ne savez plus trop ?

Créer un nouveau compte

Vous inscrire sur ce site Identifiants personnels

Indiquez ici votre nom et votre adresse email. Votre identifiant personnel vous parviendra rapidement, par courrier électronique.

Informations personnelles

Pas encore de compte?
Soyez un ange, abonnez-vous!

Vous ne savez pas comment vous connecter?

Poésie La langue en chaleur

avril 2022 | Le Matricule des Anges n°232 | par Richard Blin

Quand André Velter et Ernest Pignon-Ernest s’associent pour décliner les voluptés de l’amour vécu avec amour, le livre se fait fête et festin.

Au feu du désir même

Quand on est, comme André Velter, mû par la soif de connaître, la disponibilité à l’inconnu, la quête de la jubilation physique et mentale, on peut faire voyage de tout. « Chaque voyage est un coffre à secrets / Qui se force par hasard / Pour une aube au crépuscule / Ou un éclat à même la peau ». Après ses voyages au long cours dans l’Himalaya, en Inde, au Tibet et dans tout l’Orient, c’est la volupté qui, dans Au feu même du désir, fait l’objet de son voyage.
Un livre où il apparaît à la première personne du pluriel, autrement dit sous la forme de plusieurs auteurs différents à qui il donne la parole. Quatre auteurs, quatre avatars : Amarusha, une sorte de prince indien ; Libertinus, un Romain qui aurait connu l’empire ; Raffélis, un troubadour provençal chantant l’amour au plus près plutôt qu’au plus loin ; El Juan, un lointain cousin d’un grand d’Espagne prétendant n’être l’artiste que de son bon vouloir. De la part de celui qui sait si bien l’art de se laisser habiter par les forces et les formes que lui offrent les circonstances, il s’agit d’un prétexte pour mieux restituer et mieux célébrer l’amour des corps par les corps. Mieux changer de rôle aussi, pouvoir devenir un temps « Sexus Imperator », pouvoir se montrer fétichiste ou se retrouver « Minotaure » le temps d’une nuit. Mais s’ils mettent à l’épreuve la notion d’identité, tous ces autres permettent surtout d’exalter la sauvage magie de l’enivrement charnel, de donner voix aux configurations et aux émois d’un « Je » lorsque celui-ci « bande comme quatre » ou « ne se connaît pas d’interdit, improvise sans cesse à corps perdu et retrouvé ».
Quatre suites libertines qui chantent le vertige ascendant du désir de vivre le désir. « Quand le désir a jeté les dés / Le jeu se donne sans foi ni loi / Et la mise ou la muse / Sont de stricte indécence / En dessous rouges et noirs / À même la table ou le tapis ». Qui modulent la façon dont, défiant les convenances, il efface les frontières, nous embarque pour des « transports hors du commun ». Du simple bonheur de voir ou d’effleurer, à l’allégresse affamée de l’effusion érotique, en passant par « tout l’arc-en-ciel des murmures et des cris », c’est l’amour vraiment fait avec amour que célèbrent ces poèmes. Le sexe impudique, magnétique, solaire ou despotique. « Le verbe à votre bouche / N’est plus qu’impératif / Jeté du bout des dents // Je passe sous votre joug ». Belle façon de conjuguer l’art de jouir à un art d’aimer cherchant des reposoirs à sa passion.
Festin d’ardeurs et d’émerveillements, de candeur et d’excès, d’insolence épicée et de suavité violente, ce livre est un grand OUI à la beauté de l’érotisme et aux passes incantatoires de la luxure. Une luxure qui n’est pas un luxe mais implique un éveil constant et une intelligence amoureuse de la mathématique vibrante des rites de la volupté. Un livre qui sort le grand jeu, fait la preuve par quatre que l’art n’est pas chaste dans sa volonté de nous mettre en contact avec l’existence à l’état pur. Et comme pour mieux le souligner, tout le livre est scandé par des croquis à main levée, des dessins aux ondoyances lascives, des épures, des esquisses qu’Ernest Pignon-Ernest a puisés dans ses carnets personnels. Ils ne viennent pas illustrer les poèmes mais exalter l’émotion érotique, imager les éclairs du désir, donner grâce à son intensité tournoyante. Des images qui tiennent autant du songe que de la sensualité et rendent éminemment visuel un livre frémissant de toutes les joies de la création et de ce qui rend succulente la vie.

Richard Blin

Au feu du désir même
André Velter et Ernest Pignon-Ernest
Actes Sud, 144 pages, 29

La langue en chaleur Par Richard Blin
Le Matricule des Anges n°232 , avril 2022.
LMDA papier n°232
6,50 
LMDA PDF n°232
4,00