Au fond de la mine, dans le Nord-Pas-de-Calais, en 1948. C’est là que nous place Penda Diouf au début de la pièce. Au fond, tout au fond. Avec Jean Guidet, un mineur qui a commencé très jeune à pousser les wagonnets avant de devenir piqueur. Et puis l’accident : un coup de grisou. Jean est secouru par ses camarades, mais pour lui, c’est une dame qui est apparue et l’a sauvé. Et au sortir du coma, il décide de se consacrer à la peinture et à cette apparition. Voilà pour la Terre. Car la pièce de Penda Diouf est partagée en quatre parties, les quatre éléments. Chacune raconte l’histoire d’un personnage dont la vie va croiser celle des trois autres. Après la Terre donc, voici l’Air et l’histoire de Barbara Amraoui. Fille d’émigrés polonais, elle épouse Saïd, un Algérien qui sera expulsé de France pour avoir participé aux grandes grèves de 1947. Barbara s’enfuit alors dans la forêt où elle vivra en ermite. Et elle rencontre Jean Guidet qui croit reconnaître en elle la dame qui l’a sauvé. Ensuite, le Feu nous raconte la vie de sa fille, Hajar Hamraoui. Décidée à garder la maison de ses parents, au cas où ils reviendraient, elle vit à l’écart du monde, cultivant quelques légumes qu’elle vend ici ou là. Jean Guidet présentera dans sa maison une exposition des toiles qu’il a consacrées à sa mère. Enfin, Iris Leroy apparaît dans la quatrième partie, l’Eau. « Je suis née un jour de grandes pluies estivales. (…) La terre assoiffée réclamait à boire. La terre craquelée n’était plus que poussière et désolation. L’herbe comme du foin ». Fille de mineur, elle est affectée au tri : « Mes mains sentent l’urine des hommes en bas qui n’ont pas de toilettes et pissent sur le charbon. » Elle passe le concours des postes, devient factrice et s’installera chez Hajar.
L’écriture de Penda Diouf, toujours aussi belle, se met au service d’un travail de souvenir, mêlant le fantastique et le quotidien, racontant le climat politique de cette après-guerre et s’appuyant sur l’histoire vécue d’Augustin Lesage, une figure importante de l’art brut. C’est un très beau texte, qui nous parle d’amour et de transmission.
PGB
Noire comme l’or
Penda Diouf
Quartett, 96 pages, 12 €
Théâtre Noire comme l’or, de Penda Diouf
juin 2022 | Le Matricule des Anges n°234
| par
Patrick Gay Bellile
Un livre
Noire comme l’or, de Penda Diouf
Par
Patrick Gay Bellile
Le Matricule des Anges n°234
, juin 2022.