Bonsoir/ vous êtes bien installés/ tout va bien/ je me présente je suis Ahmed Madani et voici Anissa ». Ahmed Madani a rencontré Anissa à l’occasion de son précédent spectacle F(l)ammes qu’il a réalisé avec des jeunes femmes des quartiers populaires. Intrigué par le fait qu’elle parlait toujours de sa mère, mais jamais de son père, il a cherché à en savoir un peu plus. Et Anissa lui a raconté : son père parti avant sa naissance parce qu’il ne voulait pas d’enfant, la photo d’un autre homme que sa mère lui donne pour répondre à ses questions, le hasard ensuite qui la met sur une piste. Ahmed Madani lui propose de poursuivre avec elle cette quête du père et de porter ensuite toute cette histoire sur la scène d’un théâtre. En y mêlant d’autres souvenirs, en élargissant le propos pour faire de la pièce une réflexion sur la paternité et le rôle et la place des parents. L’auteur lui-même s’approprie cette histoire : « dans mes spectacles/ je me saisis de la vie des autres/ pour raconter la mienne ». Le décor représente une cuisine. Et durant tout le spectacle, Anissa cuisine des pralines et des fondants au chocolat parce que « Vous l’avez compris je n’aime pas le théâtre/ en revanche j’adore raconter des histoires à mes amis ça j’adore/ leur préparer des pâtisseries leur cuisiner des petits plats/ rire m’ambiancer avec eux je kiffe trop ».
Dans une langue imagée, souvent très drôle, passant du coq-à-l’âne, de l’anecdote à une réflexion plus grave, Anissa et Ahmed creusent là où ça fait mal, ces relations de famille qui souvent compliquées restent difficiles à éclaircir car « il y a des enfants que tu élèves que tu ne vois plus/ et il y a des enfants que tu n’élèves pas/ mais qui deviennent éternels pour toi. » Ce texte a été écrit pour être joué devant des collégiens et des lycéens. Et dans une piste pédagogique proposée par sa compagnie, Ahmed Madani enfonce le clou : « Tout enfant a un père qu’il soit présent ou absent, qu’il ait quitté le domicile familial, qu’il ait ou non reconnu son enfant, qu’il soit ou non décédé. »
PGB
Au non du père
Ahmed Madani
Actes-Sud-papiers, 64 pages, 10 €
Théâtre Au non du père
septembre 2022 | Le Matricule des Anges n°236
| par
Patrick Gay Bellile
Un livre
Le Matricule des Anges n°236
, septembre 2022.