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Domaine français Renaître de ses cendres

mai 2023 | Le Matricule des Anges n°243 | par Yann Fastier

Persévérant dans la veine réaliste teintée de fantastique et d’humour de ses précédents romans, Olivier Mak-Bouchard nous venge de Parcoursup et rebat les cartes des destins tout tracés.

Il y a toujours un chat pour se promener dans les livres d’Olivier Mak-Bouchard, en manière de genius loci flegmatique et discrètement bienveillant. Dans Le Dit du Mistral, c’était un fantôme blanc chaussé de bottes, qu’il revenait traîner en douce dans Le Temps des grêlons. La Ballade du feu le voit vêtu d’un smoking mais sans doute est-ce le même chat, qui n’aura fait que changer de livrée pour l’occasion. N’est-il pas chez lui, après tout, dans un roman qui paraîtra déjà familier à ceux qui ont lu les précédents, tant Olivier Mak-Bouchard a su dès l’abord dessiner les contours de son domaine ?
Ce domaine – ce terrain de jeu – c’est d’abord le Luberon, cher aux lecteurs de Henri Bosco, « petite patrie » dont Olivier Mak-Bouchard, pour y être né, connaît comme personne les beautés et les rigueurs, loin des clichés d’une Provence de carte postale. La sienne est parfois rude, hivernale souvent et, surtout, résolument prosaïque : les belles maisons de pierre y sont impossibles à chauffer et on n’y trouve guère de travail quand, à l’instar du narrateur, on n’a ni qualification ni rien qui fasse espérer autre chose qu’un très hypothétique emploi de manutentionnaire ou de gardien. Il n’y a cependant là aucune fatalité et, par la magie d’une série de rencontres ne devant rien au hasard, le jeune homme en plein marasme personnel et professionnel se verra enfin renaître à lui-même pour devenir le potier qu’il avait toujours rêvé d’être.
Ce pourrait être l’argument d’un feel good book ordinaire et, sans conteste, ce livre fait du bien. On aura beau faire le bonhomme, biberonner au polar le plus noir, invoquer les mânes de Cioran et brandir les œuvres complètes d’Albert Caraco, on n’en prendra pas moins un plaisir extrême à se laisser mener à dos de phénix par un auteur bien déterminé à venir vous chanter la ballade, la ballade des gens heureux. Car Olivier Mak-Bouchard a l’optimisme malicieux, et ce n’est pas sa moindre qualité, qui lui permet de ne jamais sombrer dans cette bienveillance obligatoire et de pure forme qui rend l’époque encore plus désespérante qu’elle ne l’était déjà. Il y a chez lui une forme de simplicité qui n’éprouve pas le besoin de forcer la sympathie et vous embarque dans l’histoire en souplesse, sans grands mots, avec une sincérité littéralement désarmante qui n’est pas sans rappeler la manière d’un Jean-Claude Mourlevat, pour ne citer que le meilleur.
Une sincérité, toutefois, qui n’exclut pas la ruse quand il s’agit de construire un récit volontiers folâtre et non dénué de surprises, de chausse-trappes, de figures en miroirs ou d’intertextualité quand il n’a pas le clin d’œil autofictif.
À cet égard, La Ballade du feu forme avec Le Dit du Mistral un parfait diptyque, presque bachelardien dans le rôle fondamental qu’il prête aux éléments, la terre et le feu assumant dans le premier ce que l’air et l’eau exprimaient dans le second. Dans l’un comme dans l’autre, cette dimension élémentaire, mythique et traversée de légendes intercalées entre les chapitres, forme comme une doublure au roman, une armature invisible qui le soutient et lui fait déployer ses ailes en tirant son réalisme très « classe moyenne » vers un fantastique en demi-teinte aux allures de conte moderne. Là où la souillon devenait princesse et le vilain petit canard un beau grand cygne, la jeune aigle de Bonelli qui s’électrocute au début du roman se remet et s’envole toujours plus loin pendant que l’écolier mal orienté renaît de ses cendres pour se découvrir thaumaturge à son tour. On n’aura pas tant souffert devant le Kes de Ken Loach pour n’être pas content pour lui, et soulagé. Car il faut croire en ses rêves, paraît-il. Olivier Mak-Bouchard rêvait-il d’être écrivain ? Si tel est le cas, il a bien fait d’y croire.

Yann Fastier

La Ballade du feu
Olivier Mak-Bouchard
Le Tripode, 265 pages, 20

Renaître de ses cendres Par Yann Fastier
Le Matricule des Anges n°243 , mai 2023.
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