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Poches Des roses et des rosses

juin 2024 | Le Matricule des Anges n°254 | par Jérôme Delclos

Réédition du dixième opus de la saga « Harpur & Iles » du géant du polar Bill James (1943-2023), hors-d’œuvre avant de la lire toute.

Retour après la nuit

Le monde du polar est petit. C’est Robin Cook qui présente à François Guérif John Harvey, lequel lui présentera Bill James que l’éditeur, à qui l’on doit les plus belles trouvailles de Rivages Noir, mentionne dans ses mémoires comme « un auteur de tout premier plan », à l’univers « à la fois très noir et très drôle » (Du polar, Payot, 2013). Ledit Bill James, alias David Craig, alias Judith Jones, de son vrai nom Allan James Tucker, lui suggère de le lancer en France avec Roses, Roses (1993) traduit par Retour après la nuit. Le roman préféré du Gallois qui en écrivit 80 ? C’est un drame très sombre : la mort de l’épouse du superintendant de police Colin Harpur, lardée de coups de couteau, tirera des larmes à qui dans les épisodes précédents s’est attaché à Megan, personnage sensible, « décent » disait son auteur, et qui parce que négligée trompe son mari volage avec un de ses collègues, Tambo (un sobriquet contractant « Tamerlan » que ce flic « beau mec » sorti d’Oxford a joué au théâtre, avec « cet excité de Rambo »). C’est le dixième tome d’une saga culte en Grande-Bretagne qui en comporte 35, dont 14 traduits chez Rivages : tout un univers très fouillé de flics et de truands, et un humour acide. Un roman-fleuve à rebondissements, dont les personnages principaux, l’adjoint au chef de la police Desmond Iles, son subordonné Colin Harpur, leur patron Mark Lane qu’ils jugent nul, vieillissent et évoluent au fil des saisons. Tout comme, seconds rôles, leurs épouses et maîtresses, leur indic élégant « Oliver le Diplomate », le patron de club Ralph Ember plus ou moins rangé des voitures, enfin plutôt moins que plus. Sans oublier les gros truands que le tandem traque, dingues de leurs gosses qui fréquentent les mêmes établissements privés haut de gamme que ceux des gradés de la police (ainsi Ralph Ember dans Club, un des meilleurs de la série, qui tient à ce que sa progéniture fasse du latin quand trop d’écoles, déplore-t-il, négligent « les humanités »). Si l’on veut comparer, on pense à la saga de John Dortmunder de Donald Westlake, avec ses personnages récurrents, son pub où les habitués le sont toujours des mêmes consos, et son humour blasé, imperturbable et très dialogué.
Forcément, on devient vite accro, et on le sera d’autant mieux aujourd’hui à l’ère des séries TV. Le plaisir est intense de retrouver des personnages archi-caractérisés, l’adjoint Iles surtout, vraie tête de lard et capable des reparties les plus distinguées comme les plus triviales. Dans le très nerveux L’Inspecteur est mort, à Harpur qui lui demande de préciser qui (« Pardon ? Lequel ? Je ne suis pas au courant »), Iles répond « Imbécile. L’inspecteur en tant qu’espèce ». C’est Socrate en bad cop. Même si le point de vue est omniscient, on entend toujours plus ou moins à la lecture la voix familière de Desmond Iles, son ironie de grand flic désabusé mais qui fait le job, et qui ôte l’armure plus souvent qu’il ne le voudrait. « Iles se nourrissait et survivait grâce à son venin, bien sûr, mais il laissait parfois apparaître quelques liens avec l’humanité. » Ici le « bien sûr » est of course essentiel. Les dialogues sont secs, avec ce flegme que nous autres Français envions aux British. Ainsi quand Hazel, la fille adolescente et futée de Megan et Colin Harpur, en deuil de sa mère, s’enquiert de qui va « s’occuper de trouver le meurtrier », ça donne ça : « – Monsieur Iles, dit Harpur. /– Génial, fit Hazel./ – Merci, répondit Iles./ – C’est sans espoir si c’est lui, dit Hazel./ – Merci./ – Les gens ont besoin de quelqu’un comme vous, de temps en temps, c’est comme les balais à chiotte./ – Merci, Hazel. Ça s’appelle le nettoyage, tu connais ? »
Efficacement composé, Retour après la nuit tresse le récit de la nuit rose et noire de Megan avec l’enquête diurne et rouge sang de Harpur et Iles plus méchants que jamais. Mais l’essentiel est dans le ton, le style en images mi-sérieuses, mi-loufoques. Morceau d’anthologie du machisme de commissariat (un genre en soi), la tirade de Desmond Iles à Colin Harpur endeuillé : ce qui leur arrive aux « pauvres chéries », c’est « à cause de ce terrible amoncellement de chaleur secrète, comme un feu qui couve sous une meule de foin ». Harpur pleure et nous on rit.

Jérôme Delclos

Retour après la nuit
de Bill James
Traduit de l’anglais par Danièle Bondil
Rivages Noir, 368 pages, 9,90

Des roses et des rosses Par Jérôme Delclos
Le Matricule des Anges n°254 , juin 2024.
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