La rédaction Jérôme Goude
Articles
Un auteur
Épopée mécanique
Roman hybride et revigorant, Nos si brèves années de gloire de Charif Majdalani dépeint les tribulations sociales et érotico-amoureuses d’un jeune Libanais.
Halim Cassab, homme industrieux à la « réputation de voyou de luxe », meurt assassiné en laissant sa famille sur la paille. Ghaleb, son fils, à défaut de pouvoir faire des études supérieures, devra travailler d’abord dans un magasin de tissus comme simple vendeur, ensuite comme secrétaire d’un homme de lettres francophile. Aventureux, le jeune homme s’ennuie, joue aux échecs et participe à un projet plus qu’hasardeux. Ce jusqu’à ce qu’il accepte une mission de la part d’un certain Maxime Elias, riche industriel exproprié. Il part alors en Syrie, flanqué de fringants acolytes, afin de...
Un livre
Étoiles ennemies
de
Alain Hobé
La petite mort
Dans « Étoiles ennemies », premier livre très épuré, Alain Hobé projette le lecteur au cœur de l’abîme impersonnel et statique d’une séparation amoureuse.
Tout commence de façon syncopée et minimale avec un énoncé-couperet dont l’apparente clôture du sens déconcerte, voire interdit : « Nous ne sommes pas au monde. » Ce trognon de parole recense le défaut d’un être au monde, à l’Autre, qu’un impossible à dire condamne au silence vespéral. Puis le récit bascule sans coup férir du « nous » vers un « il » abscons car inassignable. Cet « il »...
Un auteur
L’expropriation du poète
À travers les petits éclats irisés du recueil « Le Démon d’antichambre », Christian Bachelin égrène un chant prosaïque et mélancolique qui convoque la mémoire en son éclipse.
Dans le Problème XXX (Allia, 2004), Aristote opère un nouage entre le génie poétique et la mélancolie ouvrant une voie qui ne cessera d’être explorée. Christian Bachelin propose une lecture et une réécriture singulières de ce qui est devenu un des leitmotive de la poésie occidentale depuis le Moyen Âge. Dans Le Démon de l’antichambre, la jeune femme endeuillée « accroupie sur une tombe » de...
Un livre
Déjeuner de famille
de
John Cheever
La faute en partage
Dans les courts récits de « Déjeuner de famille », l’Américain John Cheever (1912-1982) dissout le vernis social d’une humanité tiraillée entre idéal de pacotille, bas instincts et componction.
Longtemps, une improbable élite s’est obstinée à ne voir en John Cheever qu’un tâcheron du New Yorker. D’aucuns pinaillent encore et proclament Raymond Carver en tout supérieur. Dans Les Vitamines du bonheur, ce dernier ne s’est-il pas fendu d’un probant hommage au « Tchekhov des banlieues » ? « Le train », plus qu’une suite apéritive de l’hitchcockienne nouvelle « Le 17h48 », pourrait bien...
Un auteur
Le tracé de l’attente
Imbriquant méditations esthétiques, fragments mnésiques, rêves et sensations, « Entrée de secours » de Fred Deux épouse les courbes et glane les bris d’une parole en souffrance.
À Marseille, deux événements apparemment anodins vont infléchir la trajectoire par trop définie de Fred Deux : l’apparition inopinée d’un rat et l’œuvre de Paul Klee. La découverte du peintre suisse est en effet à l’origine des taches dans l’opacité organique desquelles Fred Deux fourrage encore. Le rat, convoqué en maintes occurrences dans l’ensemble de son œuvre, quelle qu’elle soit,...