La rédaction Thierry Guichard
Articles
Une histoire française
Le premier roman de Lolita Sene, un été chez jida, renoue avec ses racines kabyles, une Histoire douloureuse et l’indicible violence faite à une enfant. L’écriture comme un baume.
Elle est aujourd’hui vigneronne, produit des vins subtils et joyeux auxquels elle donne parfois un nom venu de l’enfance comme à son cinsault de soif, Couscous. Et peut-être a-t-elle appris en soignant avec de la valériane les vignes blessées par la grêle, qu’on peut appliquer sur les blessures de quoi cicatriser les plaies et renforcer les corps. Un été chez Jida est un roman qui soigne, où les mots viennent de loin, sont posés sur la page avec une précaution qui les rend plus prégnants. Roman parcellaire, fait de chapitres courts qui sont comme des pièces d’un puzzle difficile à...
Les amnésiques n’ont rien vu d’inoubliable
Chaque jour, à 13h30 sur France Culture de joyeux drilles jouent les papous en s’essayant à des jeux oulipiens. Hervé Le Tellier n’y est pas le dernier de la classe. L’auteur de l’excitant roman Le Voleur de nostalgie (Seghers, 1992) a dû apprécier le jeu qui consiste à prononcer une phrase commençant invariablement par « Je pense que », comme s’il fallait, invariablement, définir le monde en...
Simple émotion (La)
Né en 1921 sur le plateau d’Asagio qu’il ne cesse d’évoquer, l’Italien Mario Rigoni Stern s’est engagé dès 17 ans pour la Seconde Guerre mondiale. La traversée du conflit, son emprisonnement par les Allemands, son évasion ont nourrit son écriture attachante et humble qui professe que « sur le monde, nous sommes tous du même village » (Rencontre en Pologne). L’écrivain n’en a jamais eu fini...
Le Dernier des Egyptiens
Parti sur les traces de Champollion, chasseur de signes comme lui, Gérard Macé découvre que l’inventeur du secret des hiéroglyphes se faisait lire, durant l’hiver 1827, Le Dernier des Mohicans que Fenimore Cooper vient de faire paraître. Ému par sa découverte romanesque des Indiens, Champollion, fait état de cette lecture dans sa correspondance. À la croisée des chemins, entre la fiction de...
Un éditeur
Climats : la passion pour surmonter la tempête
Avec cent soixante titres à son catalogue (à raison de deux nouveautés chaque mois), Alain Martin garde le cap de sa maison d’édition malgré les tempêtes et les orages. Et se prépare tranquillement à fêter dix ans d’édition.
Celui qui a tout compris du sens de la vie, c’est le chat d’Alain Martin. Alors que ses maîtres pianotent sur leurs ordinateurs et répondent au téléphone, le chat, lui,...
Médiatocs – chronique
Pare-chocs du moi
Écrite précipitamment dans l’absence de style, l’autobiographie de l’ancienne directrice du Monde des livres atteint à des abysses de pensée. Du moment que ça la soulage….
Elle était la directrice du Monde des livres jusqu’au jour (« un matin de janvier 2005 ») où on lui annonce qu’elle est démise de cette fonction pour redevenir une simple journaliste. Josyane Savigneau vit d’autant plus mal sa mise au placard (qui la vivrait bien ?) que celle-ci la renvoie à un complexe d’imposture qui l’habite depuis toujours et qu’elle va tenter de résoudre en écrivant ce Point de côté. On espérait une réflexion sur le métier de journaliste, une description des rouages de la critique parisienne ou au moins une véritable plongée dans les mécanismes intimes, inconscients...
Un âne, des mots
Claire Castillon a probablement un vrai talent d’écrivain. Mais ses lecteurs ont assurément beaucoup de patience. Son nouvel opus, indigeste en diable, impose une lecture éprouvante.
Cette rubrique, consacrée aux très médiatiques romanciers allait tranquillement vers la proclamation d’un axiome incontestable. Quelque chose comme : un best-seller se fabrique. Dès sa conception jusqu’à son écriture, un best-seller imite plutôt la pente douce (qu’on dévale sans y prendre garde) que la montée abrupte qui nécessite effort et courage. Les ingrédients du best-seller se trouvent...
“ Les mecs, on la perd ! “
Quels ingrédients faut-il pour faire un best-seller ? Une louche de clichés alignés par un style de collégien attardé et assez de cynisme pour prendre ses lecteurs pour des gogos.
Prenez une pincée de Paulo Coelho, le romancier philosophe pour ménopausés du cerveau, dont vous extrairez des préceptes profonds du genre : « accepte le destin qui est le tien et donne aux autres le meilleur de ton temps ». Cette morale à deux sous qu’adorent tous les apôtres de la domination (que les miséreux acceptent leur misère et ne viennent pas nous emmerder) nous est assénée par...
Courrier du lecteur – chronique
La preuve par huit
Publié il y a treize ans aux États-Unis, « Surfiction » est un essai réjouissant. Clair et incitatif, il donne les bases d’une réflexion en mouvement.
Constitué de huit textes vifs, Surfiction traverse une bonne partie de la littérature de création (« le roman expérimental ») des années 60 à aujourd’hui plus particulièrement aux U.S.A. Raymond Federman sait de quoi il parle, puisqu’il fut un des premiers de sa génération avec Quitte ou double (1971) à révolutionner le roman (dans la lignée de Cervantès, Sterne ou Joyce). Le bonhomme n’hésite d’ailleurs pas à se citer lui-même…
Le texte inaugural est un « manifeste postmoderne » : écrit en 1973, ce texte programmatique n’a pas pris une ride, si ce n’est, peut-être, dans l’utopique part...