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Vie littéraire Le livre en bouches

février 1996 | Le Matricule des Anges n°15 | par Marie-Laure Picot

Les Rencontres pour lire de François de Cornière poursuivent depuis quinze ans leur bonhomme de chemin en Norandie… et ailleurs. Histoire d’une création.

François de Cornière organise chaque année plusieurs dizaines de soirées de Rencontres pour lire. Un pari fou lancé à Caen, en Basse-Normandie et de plus en plus, hors région. Dans la capitale bas-normande où chaque création est inaugurée, il accueille 200 spectateurs par soir. Sa recette ? L’amour de la littérature, certes, mais surtout une formule de lectures publiques pas tout à fait comme les autres.
Ainsi, un soir de janvier, à la sortie du centre culturel de Falaise, une petite ville normande de 8000 habitants, les spectateurs conquis parlent « d’un élan », « d’un véritable tremplin pour lire ». Ce soir-là, les Rencontres pour lire présentent des écrits d’Octave Mirbeau, regroupés et édités chez Séguier sous le titre de Contes cruels et Combats politiques. Trois comédiens sont sur scène. Autour d’une table, devant des cocktails, ils lisent des articles politiques féroces, parus dans les plus grands journaux de la fin du XIXe siècle, qui renvoient à notre propre actualité. Entre chaque lecture, Karine Helbert interprète au piano des airs de Walt Disney ! Le contraste est étonnant entre la gravité des articles (les fameuses « affaires », la guerre ou la colonisation) et la légèreté des morceaux musicaux. Le tout renvoyant à l’esprit caustique d’Octave Mirbeau.
Les Rencontres pour lire ont fêté l’an passé leur quinzième année d’existence : « Un feu d’artifice pour couronner 15 ans d’efforts », précise leur créateur. Elles sont en effet le résultat d’un entêtement conjugué au principe de plaisir. À l’origine, une minuscule (par la taille) revue de poésie La Corde raide fondée en 1977 : en 28 numéros, François de Cornière publie des auteurs contemporains souvent peu connus et s’affirme dans son rôle de fervent défenseur de la littérature. Le projet de lectures publiques d’abord conçu dans le cadre des animations du théâtre dont il est responsable, s’impose naturellement à ce mordu de poésie. La première formule des Rencontres pour lire inaugurée en 1980 reste classique dans la forme : un extrait d’œuvre lu par un comédien est suivi ou précédé d’une interview de l’auteur. François de Cornière invite Guillevic, Jean Rousselot, Andrée Chédid, Patrice Delbourg mais aussi des éditeurs comme Georges Monti, René Rougerie ou Jean-Michel Place.
La formule actuelle, à travers laquelle cette heureuse création a trouvé sa singularité, est inaugurée avec Norge en 1984. François de Cornière renonce « au baratin » et propose une heure quinze de lecture-spectacle qui doivent se suffirent à elles-mêmes. Les lectures sont accompagnées de morceaux musicaux arrangés pour la représentation. Les rencontres laissent désormais peu de place à l’improvisation sans renoncer cependant à leur sobriété initiale. Les comédiens (ils sont généralement deux à trois sur scène) et les musiciens sont discrets dans leur prestation. Chacun maîtrise sa partie et respecte celle de l’autre. Une atmosphère particulière, comme suspendue au texte lu, plane invariablement sur la scène des Rencontres pour lire. Pour tout décor : deux ou trois chaises, un piano, parfois quelques objets en guise de clin-d’œil, ajoutent à la sobriété. La lecture, comme ses silences, montre un profond respect pour le texte. La formule, modeste et géniale, tourne rondement, comme une petite musique insolite.
Celui qu’on surnomme « l’homme orchestre » a su préserver une parfaite liberté de création tout en bénéficiant d’aides extérieures (le CNL, La DRAC de Basse- Normandie, la ville de Caen, le CRL de Basse-Normandie…). Seul salarié permanent de l’association « Les Rencontres pour lire », François de Cornière est aidé dans son entreprise par une petite équipe (conquise), rattachée au théâtre de Caen. En revanche -et là réside l’autre particularité de cette initiative originale- les lectures-spectacles ont la bougeotte : créées dans des villes d’accueil qui veulent bien mettre à disposition leur théâtre, leur salle des fêtes, leur cinéma ou leur bibliothèque, elles vont là où on les invite et multiplient les séances en fonction des demandes. Une représentation coûte environ 10 000 F à l’association culturelle de la ville d’accueil, ce qui est peu compte tenu de la qualité du spectacle. Sur les choix des auteurs, François de Cornière n’a qu’une réponse : « Je conçois les Rencontres pour lire comme des numéros de revue. On aime ou pas ». Effectivement, on peut aimer ou ne pas aimer les écrits de Charles Juliet, Christian Bobin, James Sacré, Kenneth White, Paul Fournel, Gil Jouanard, Franck Venaille, Claude Roy, Georges Haldas, Annie Saumont, Jacques Réda… tous mis en scènes et en musique depuis 1984 ou encore ceux de Fernando Pessoa, d’Éric Holder ou d’André Dhôtel pour les projets futurs… Les Rencontres pour lire sont une manière de les découvrir, de les redécouvrir ou peut-être, de les aimer autrement.

Le livre en bouches Par Marie-Laure Picot
Le Matricule des Anges n°15 , février 1996.