Le Littrorama ou le triomphe de la roue libre (Livre Premier)
Selon Pierre Bettencourt, Le Littrorama, au titre passablement énigmatique correspond à son dernier feu d’artifice littéraire, « à une manière de lancer (ses) derniers rayons ». Le mot “rayon” est ici à entendre dans sa double acception puisque l’auteur a collecté, à la fois dans les pages du Littré et dans celles des innombrables livres qui composent sa bibliothèque, citations insolites ou fragments textuels, sans se priver à l’occasion d’ajouter aux unes comme aux autres certains développements de sa composition. Pour pleinement goûter ce vagabondage facétieux et érudit, il convient d’avoir à l’esprit que Pierre Bettencourt jure sur ce qu’il possède de plus cher que tous les extraits reproduits sont strictement authentiques. La précision ne manque pas d’intérêt dans le cas de cet abasourdissant passage du Journal d’Anne de Noailles : « André Gide, écrivain paludicole de la première moitié du XXe siècle, vint me demander de collaborer à sa petite revue (la NRF) : il me trouva pâmée de rire avec mes femmes de chambre. »… et donne tout leur sel à tels propos de Bossuet : « Les blondes réputées pour avoir un sexe exogyne sont très prisées des hommes libidineux qui cherchent un exutoire à leurs débordements. » ou encore du même : « Tout ce que l’on pense de Dieu n’est qu’un songe. » Au sujet de cette dernière phrase, Pierre Bettencourt estime en un impeccable raccourci que « l’opinion que Dieu est incompréhensible n’a en soi aucun intérêt, mais prend une autre saveur sous la plume de Bossuet. » L’on ne saurait mieux dire et il est tentant de lui retourner le compliment car les charmes de certains mots nous restaient obstinément cachés jusqu’à la parution de ce Livre Premier du Littrorama : « D’un geste gracieux, elle enleva sa robe, et me parut enfin dans toute sa beauté, vêtue de ses seuls phanères. »
Éric Naulleau
Le Littrorama ou le triomphe de la roue libre
Livre Premier
Deyrolle, 192 pages 125 FF