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Domaine français Sous les pavés, la farce

janvier 1998 | Le Matricule des Anges n°22 | par Philippe Savary

Mauvaise conscience du Luxembourg, Guy Rewenig dresse une carte vitaminée des grands idéaux nationaux. Dérision, déboires et gags en série.

La Cathédrale en flammes

L’automne s’annonce plutôt mal. Linda s’est tirée. En Provence avec un joueur de volley. » C’est ainsi que commence le roman un brin loufoque de Guy Rewenig, considéré, est-il écrit en quatrième de couverture, comme l’enfant terrible de la littérature d’expression luxembourgeoise. Terrible, n’exagérons rien. Disons irrévérencieux, fantasque, satirique, à la plume d’une surprenante vitalité. « J’ai plutôt l’âme islandaise : à l’intérieur ça bouillonne de passion, mais les flammes ne jaillissent que rarement », fait-il dire à son anti-héros, un Pied Nickelé au cœur tendre, atteint de nichomanie (« les seins sont l’élément fondamental de l’existence »).
John Dennewald est graphiste au Grand-Duché. Ses affiches ont longtemps décoré les vitrines des permanences syndicales. Le bonhomme a quitté le bassin minier d’Esch pour la capitale, « la Ville », en même temps que ses idées « en béton armé ». Anti-nucléaire, anti-calotin, anti-consumériste, John rêve toujours du raz-de-marée internationaliste, mais en moins grand. L’époque bénite où il fallait jeter RTL à la poubelle, en faire baver aux patrons, boire du café nica pour soutenir la révolution sandiniste, avaler des tonnes de sardines en hommage aux compagnons portugais est révolue. John n’a plus « la tête dans les nuages rouges », tout juste saoule-t-il ses copines de désirs utopiques. Désenchanté, il a tout compris de la subversion de velours : quand l’insoumis fait des campagnes de pub pour le compte du grand capital, c’est une nouvelle forme de guérilla intersociale qu’il invente.
Les rêves brisés, les horizons généreux lui manquent. John se sent à l’étroit dans ce petit pays de 80 km sur 40, cette « chiure de mouche », avec sa population « aimable à chier ».
Entre la mère qui collectionne les philodendrons et les saintes vierges, le copain Pierrot qui veut toujours dégommer les avions militaires américains et l’oncle Albert qui atterrit dans un asile après l’échec de son complot anti-boche, Guy Rewenig raille les grands écarts de l’identité nationale. Le guévarisme contre l’intégrisme, le salut à la déchéance… mais est-il encore possible de ressortir le poing de la poche, sans caricature ? Peut-être, mais « à qui le montrer, son poing ? ».
Armé d’un nez rouge ou d’une paire de lunettes à monture bleu ciel, Rewenig joue au trublion, au déserteur. Sans prétention, sur le mode de la farce, en revêtant l’habit du conteur farfelu, il essaie de reconstituer les bribes (les débris) d’une conscience nationale. Derrière les gags monty-pythonesques et ce torrent verbal qui inonde délicieusement les pages, il y a comme un inassouvissement.
Ce livre laisse de nombreux espoirs mourir comme une vague. Et on se dit que, peut-être, c’est Nada qui a raison, l’amie délurée de John, elle qui ne connaît Hitler ou Pinochet ni d’Éve ni d’Adam, elle qui prend les Pershing pour de la laque capillaire, parce qu’elle vit « comme si elle venait d’être mise au monde. » Finalement, Rewenig se console comme il peut. Même si les cathédrales flambent en cette fin de siècle, difficile de se réchauffer le cœur. L’ironie et le cynisme restent une bonne couverture pour se garantir du froid.

La Cathédrale en flammes
Guy Rewenig

Traduit du luxembourgeois
par Jean Portante
270 pages, 120 FF

Sous les pavés, la farce Par Philippe Savary
Le Matricule des Anges n°22 , janvier 1998.
LMDA PDF n°22
4,00