Quand Olivier Saison met en scène le spectacle navrant du petit écran, cela donne une nouvelle piquante et désinvolte (la première qu’il ait écrite !) où s’entremêlent matières plastiques, talons aiguilles et portes-jarretelles.
Lux, charmante et vénale étudiante a flashé pour Nadia Nivedkine : la belle lui a pourtant pris son mec, mais qu’importent les attraits du monde mâle, Lux est amoureuse de cette poupée brune. Résidences exotiques, milkbars, planches de surf, pin-up ensorceleuses : ajoutez quelques étudiants basanés à l’allure hispanique, vous obtiendrez le microcosme doré de cette « petite idylle estivale » ; un délire chromatique, scénario classique de short-story où se rencontrent des allumeuses bisexuelles à la liberté de ton très audacieuse. Dialogues fabriqués à l’inconsistance de sitcoms truffés de clichés, l’art de composer de l’auteur forme une féroce satire de ces abrutissantes caleçonnades.
Il faut dire qu’en matière de portraits féminins, il s’y connaît Olivier Saison : après Présents et autres orifices et Knut les déboires amoureux de ce genre de vamps écervelées nous sont familiers. Le regard malicieux du narrateur nous entraîne dans une parodie alerte du règne de l’apparence et de la futilité.
L’auteur est ici le chroniqueur d’une époque : l’écriture libre et très contemporaine rappelle celle des slogans publicitaires aux artifices percutants « Les aisselles glabres retiennent beaucoup moins la transpiration que les aisselles duveteuses ». D’autant plus percutants que les extravagances de cette bande de jeunes gens désœuvrés aux préoccupations fitzgeraldiennes se font au rythme d’un rock californien hallucinogène.
Le montage sans transition des plans donne au scénario un rythme saccadé qui fait du recueil un vrai divertissement où l’argent coule à flot et qui distille toute la panoplie de la série fleuve : situations cocasses à l’humour un peu potache, sensualité lourdement suggérée, vues en contre-plongée sur la frivolité de baby-dolls répondant aux noms évocateurs de Liz, Victoria ou Beverly.
Cette première nouvelle d’une surprenante verdeur inaugure donc l’œuvre de ce jeune auteur : l’exploration de l’univers féminin y est déjà le théâtre d’une quête pathétique et vaine de la vérité. L’héroïne admiratrice insatiable de son image entretenant un rapport obsessionnel à son propre néant.
Lux
Olivier Saison
Le Serpent à Plumes
88 pages, 28 FF
Poches Lux, spasme et volupté
janvier 1998 | Le Matricule des Anges n°22
| par
Béatrice Bénistant
Un livre
Lux, spasme et volupté
Par
Béatrice Bénistant
Le Matricule des Anges n°22
, janvier 1998.