Dans un monde où tout est couleur, inventer un personnage gris. Au cœur d’une société où chacun se doit d’avoir un but, imaginer une femme qui agit sans raisons. À l’heure où tout le monde lutte pour échapper à l’anonymat, donner naissance à un personnage au passé indéfini. Que dire, en effet, de Muriel Otisveiler, le personnage de Birth Days ? Ses anciennes connaissances, réunies dans une soirée qui lui est dédiée, prétendent qu’elle n’avait « pas de particularité, qu’elle semblait transparente, d’un poids trop léger, qu’elle se fondait de manière excessive dans ce qui l’entourait ». De fait, ce récit qui ne parle que d’elle, lui nie toute évolution. Des éléments de sa biographie sont pourtant lâchés, en dehors de toute chronologie. Son âge, incertain, plafonne à vingt ans, en dépit du temps qui passe. C’est le tour de force de Sibylle Grimbert : empêcher, de manière diablement efficace, toute complicité facile entre l’auteur-narrateur et le lecteur, refuser au consommateur de répondre à son besoin de logique, alimenté par plus d’un siècle de productions littéraires positivistes, le mettre face à un personnage qui « s’effrite, et quoi qu’il en soit, toujours disparaît ».
Franck Mannoni
Stock
124 pages, 79 FF
Premiers romans Birth Days
septembre 2000 | Le Matricule des Anges n°32
| par
Franck Mannoni
Un livre
Birth Days
Par
Franck Mannoni
Le Matricule des Anges n°32
, septembre 2000.