À la suite de la censure française de Main Basse sur le Cameroun, Mongo Beti recycle son
matériau et publie, en 1974, Perpétue -trajectoire tragique (reconstruite et retracée par son frère Essola, à peine sorti de camp) d’une jeune femme, morte en couche (la fatalité est inscrite jusque dans son prénom, Perpétue) à la suite de tensions conjugales. Mongo Beti, qui ne rentra dans son pays qu’en 1990 après un long exil en France, ne cessa de dénoncer les régimes successifs (celui d’Ahidjo -appelé dans ce roman Baba Toura- puis celui de Paul Biya), de détruire l’image (poncif de l’exotisme et du colonialisme) d’une Afrique figée dans des archaïsmes (sociaux, conjugaux ici) hérités « de la sagesse des ancêtres », pour y substituer celle, vivante, complexe et amère, d’une société traversée de contradictions, travaillée par la violence, l’hypocrisie et la corruption. Malgré quelques anachronismes narratifs, cette réédition est un hommage intelligent à l’activité inlassable -d’écrivain, de militant, d’homme- d’Alexandre Biyidi (vrai nom de Mongo, originaire du peuple Beti), grand intellectuel disparu en octobre 2001.
Perpétue
Mongo Beti
Buchet Chastel - 308 pages, 15 €
Domaine français Perpétue
mai 2003 | Le Matricule des Anges n°44
| par
Bertrand Serra
Un livre
Perpétue
Par
Bertrand Serra
Le Matricule des Anges n°44
, mai 2003.