Elle n’est pas bleue, mais la maison qu’habite le couple nantais aurait pu être mise en musique par Maxime Leforestier. C’est un espace qu’éclaire un petit jardin au bout duquel s’ouvrent les locaux de la maison d’édition. Deux maisons donc : la privée et la professionnelle. À quoi s’ajoute, depuis peu, une troisième demeure mitoyenne au rangement anarchique : celle des enfants. Au cœur de tout ça, un petit cheval noir qui s’avère être en fait un affectueux dog allemand : Toy. Ajoutez à cela quelques colombes qui ont investi une remise, le soleil sur le jardin, des plantes vertes dont quelques dicotylédones apétales : voilà un endroit pour bien vivre.
Pendant que Bernard reçoit dans son bureau, Brigitte travaille à côté : l’arrivée du nouveau livre du peintre Philippe Cognée et la préparation de la nouvelle édition d’Écrivains en bord de mer monopolisent son énergie.
Nés tous les deux en 1956 en Seine-Saint-Denis, ils grandissent (comme dans Amicalement vôtre) chacun de leur côté. Lui étudiera la psychologie et elle l’anglais. Ils se rencontrent à Nantes en 1976. Poursuivent leurs études à Nanterre et à la Sorbonne… Se marient en 1980 et donnent naissance à Jérémy la même année, Alice en 83 et à Joca Seria en 91.
En douze ans, ils ont publié plus de cent livres, organisent depuis 1998 le convivial festival littéraire de La Baule et assurent la direction artistique de Futur antérieur, un festival dédié au rapport entre l’art et l’histoire au Palais des Congrès de Nantes.
Le virus de l’art et la littérature, Bernard l’attrape tôt : « j’ai découvert la littérature et l’art grâce à un copain en seconde qui m’a ouvert les yeux sur le surréalisme où la littérature et l’art étaient liés. Je suis toujours resté accroché à ça : un des livres les plus importants pour moi c’est L’Aventure Dada de Georges Hugnet chez Seghers avec ses reproductions de tableaux, des poèmes etc. J’étais plus dada que surréaliste. Je me souviens avoir écrit une lettre d’injures à Philippe Soupault parce qu’il avait préfacé une encyclopédie de l’art où il écrivait :» il ne restera du dadaïsme que des trouvailles typographiques « . Ça m’avait mis tellement en rage… D’un seul coup je prends ça, dada et le surréalisme, comme une chose immense et sans fin avec plein d’ouvertures ».
À Paris, le jeune couple habite au-dessus d’une petite librairie tenue par « deux vieux messieurs adorables, qui connaissaient merveilleusement la littérature ». Premières découvertes de l’objet-livre avec les ouvrages de Guy Levis Mano, un éditeur « très inventif qui cherchait un rapport entre la forme des bouquins et le fond. Je me souviens d’un livre de Cendrars dont la couverture était en papier goudronné qui servait à protéger les malles des transports transatlantiques »…
La suite se décline à la sauce nantaise : critique d’art dans les années 80 pour Présence culturelle, il visite les ateliers de peintres. Secrétaire de rédaction, il apprend la mise en page...
Éditeur Joca Seria, l’art de vivre en toutes lettres
juillet 2003 | Le Matricule des Anges n°45
| par
Thierry Guichard
Passionnés d’art et de littérature, Brigitte et Bernard Martin ont fait de leur maison un lieu de rencontres stimulantes pour l’esprit. Avec un désir de découvrir rare.
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