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Médiatocs Pauvre people

octobre 2003 | Le Matricule des Anges n°47 | par Thierry Guichard

Peut-on rire du 11 septembre et des intégristes barbus ? Oui. Encore faut-il être drôle et non pathétique.

Allah superstar

Si l’on attend d’un roman qu’il change notre rapport au monde, il arrive plus souvent qu’il n’offre qu’un symptôme de l’époque qui l’a produit. Ainsi d’Allah superstar, petit divertissement laborieux calqué sur ce que la télévision donne de pire à voir : un univers figé dans les stéréotypes.
Le quatrième roman de Yassir Benmiloud ne serait rien si des guignols de la critique n’y avaient pas vu un chef-d’œuvre dans une surenchère de compliments aussi grotesques que risibles, comparant l’auteur à Voltaire ou Shakespeare.
Ce roman, écrit comme un « stand-up » (un sketch) de 260 pages, permet à Kamel Léon (jeu de mot !) de raconter sa brève et fulgurante ascension dans le milieu du « show-biz ». À dix-neuf ans, le garçon qui « parle mal la France » décide de devenir une star en faisant le comique. Incapable d’inventer, il copie Oussama, la marionnette des Guignols. Parmi ses illustres prédécesseurs, il s’en prend à Smaïn accusé de donner sur scène, avec son personnage de voleur de mobylette, une image convenue (pour le bourgeois) du beur des banlieues. On remarquera qu’il fait tout autant dans le cliché racial : Kamel est forcément un banlieusard, forcément un peu stupide, forcément inculte, forcément influençable par un cheik forcément intégriste. C’est du TF1 en période électorale. Cette succession de clichés (qu’on suppose voulus) en masque d’autres : ainsi la mère du triste comique était-elle « une brave Charentaise ». Il en est ainsi dans ce roman : les Charentaises sont « braves », les beurettes sont « super bonnes », être violée « il y a des femmes elles aiment ça ». Pour faire passer la pilule de ces fausses provocations, Y. B. force le trait comique. Ça sent le calembour de fin de soirée, quand toutes les blagues sur les blondes ont été épuisées. Or, il n’y a rien de plus pathétique qu’un comique qui ne l’est pas et qui s’acharne à vouloir l’être.
Adepte du calembour qui déchire sa race, notre narrateur voudrait faire du mauvais goût une arme comique. Mais ici, le mauvais goût est seulement mauvais : le comique l’a déserté.
L’auteur parsème son interminable récit de quelques jeux de mots pitoyables : « prêts liminaires » amoureux, « les médias mettent de l’huile sur le feuj ». Il trace un parallèle entre les vedettes qui signent chez Universal alors que « ta mère », c’est « dans un univers sale » ou déclare « Paoli aurait mieux fait de « rester couché » » (avec guillemets pour le cas où on n’aurait pas compris), etc. Il est vrai que pour lui, Bruno Masure est « le roi du calembour ». Ami télévore, retrouve ici tous tes héros préférés, de Delarue à Ardisson en passant par PPDA et Jamel Debbouze.
À ce côté frelaté (tendance Collaro show) de l’humour, s’ajoute donc cette langue censée faire jeune (et là, jeune et con semblent synonymes). Le mélange entre ce sabir caricatural et le comique forcé enfante des fruits indigestes : « L’Étranger de Camus, moi je l’ai lu au bahut, qu’est-ce que je l’ai kiffé ce book tellement le mec il écrit avec ses pieds-noirs ». Le franglais et le verlan, artificiels en diable, tentent vainement de donner au tout une connotation moderne que les répétitions, les ressassements ne suffisent pas à signer. Du coup, cette langue figée qui se donne en spectacle apparaît déjà comme une langue morte. Effet de réel ? Qu’il nous soit permis de croire qu’au contraire, dans les banlieues et dans le métissage des cultures, la langue sans cesse s’invente. Ce n’est pas le cas ici.
Quant au discours politique, il semble retranscrit directement depuis le Café du Commerce. Un café au zinc duquel, on rit quand même un peu plus que dans ce roman.

Allah superstar, de Y. B.
Grasset, 263 pages, 17

Ce que la presse en dit…

Les Inrockuptibles : « Affirmons le plus sérieusement du monde que, en cette rentrée littéraire 2003, Y. B. s’impose comme le meilleur
romancier de France. »
(Sylvain Bourmeau)

Le Nouvel Observateur : « … magnifique et désopilant one-man-show aux rodéos d’hypo-syntaxe virtuoses (…) Allah superstar vous
enflamme et vous transporte »
. (Fabrice Pliskin)

Paris Première : « Loin d’être anodin, ce livre dérangeant fait beaucoup réfléchir ». (Michel Field)

Technikart : « Ce livre n’est pas renversant mais juste assez drôle et irrévérencieux pour être l’un des phénomènes médiatiques de cette
rentrée littéraire. »
(Jacques Braunstein)

Pauvre people Par Thierry Guichard
Le Matricule des Anges n°47 , octobre 2003.