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Domaine étranger L’Amérique fantôme

avril 2004 | Le Matricule des Anges n°52 | par Thierry Guichard

Les héros de Michael Collins sont condamnés à une solitude sans rédemption possible qui les dépose au cœur d’une nuit sans sommeil.

Deux ans après l’envoûtant Les Profanateurs, voici le quatrième roman de Michael Collins traduit en français. À nouveau, c’est sur une trame policière, cette fois plus prégnante, que l’intrigue se joue. Le soir d’Halloween, une gamine de trois ans est retrouvée morte écrasée par un véhicule qui a laissé ses empreintes. Pour Lawrence, flic dans une petite ville du Middle West, c’est le début du cauchemar. À moins qu’il n’ait commencé avec son divorce et l’obligation de se séparer de son fils…
Les soupçons se portent très vite sur le meilleur joueur de l’équipe de foot du lycée dont la camionnette a été vue cette nuit-là dans la rue. À quelques jours d’un match crucial, le maire et le commissaire chargent Lawrence de protéger le suspect. De le blanchir. Mais rien n’est vraiment simple. Lawrence s’exécute mais supporte mal de falsifier les faits et la mère de l’enfant tuée, ombre dans la nuit, représente un mystère pour lui. Tel une phalène, il se cogne aux non-dits de l’affaire. Ça se complique encore lorsqu’il découvre qu’un second véhicule a laissé des traces de pneus sur le lieu de l’accident. Empêtré dans sa culpabilité de père (n’oublions pas que c’est une enfant qui est morte), Lawrence cherche dans ses nuits à toucher au plus près ce qui s’est réellement passé et ne voit dès lors que des victimes autour de lui. À commencer par Kyle, le quaterback de l’équipe de foot qui avoue son crime entre une mère dévote jusqu’à l’hystérie et un père violent. Mais Kyle sait-il réellement si l’enfant qu’il heurta, couchée dans l’herbe, n’était pas déjà morte ?
Disons-le tout de suite : les amateurs de polars auront leur content de rebondissements. On verrait bien un cinéaste adapter ce roman au scénario impeccablement huilé. Il suffirait de prendre un acteur aux épaules voûtées, fatigué, rongé par des insomnies coupables, de lui adjoindre un chien bourru. Mais il n’y a pas que l’intrigue à mettre en scène : les romans de Michael Collins possèdent leur propre atmosphère. Au blues intérieur du héros et, ici, de Lois, magnifique personnage de policière dont le mari VRP s’est suicidé, répond la trivialité d’une société américaine épinglée par l’auteur, irlandais d’origine. C’est un monde où les mythologies sont galvaudées, détournées de leurs sens : la religion, véritable étau, le sport, cancer social, la voiture et la politique réservées aux camelots. Les relations humaines sont conflictuelles comme si chacun vivait dans un cercle de l’enfer.
Si l’on peut reprocher au romancier de trop respecter les tics du genre (jouer sur les effets d’annonce), comme s’il voulait s’assurer l’attention de son lecteur, on reste impressionné par sa façon de peindre une Amérique malade. Les télévisions qui viennent filmer l’intimité des protagonistes, comme des mouches sur un cadavre, montrent la détérioration de cette humanité humiliée. Revenus de tous les rêves nationaux, des révolutions industrielles et sexuelles, les habitants de cette cité n’attendent plus rien, qu’un crédit pour acheter une voiture au maire de la ville. La société de consommation essaie de leur vendre « le péché sans la culpabilité ». À l’opposé, les amish, véritable secte religieuse qui refuse tout progrès ressemblent « dans leur minibus (à) un chargement d’épouvantails ». On est alors fasciné par ce portrait que Collins dresse (comme le fait Russo) des États-Unis. On est touché aussi par des phrases qui fouettent parfois le lamento de la narration : « L’adolescence des filles est un sport sanglant, autant que le foot et le basket ». Dans la nuit américaine ce qu’on voit alors c’est le rouge du sang et nul signe d’une aube à venir.

Les Âmes perdues
Michael Collins
Traduit de l’américain
par Jean Guiloineau
Christian Bourgois éditeur
334 pages, 23

L’Amérique fantôme Par Thierry Guichard
Le Matricule des Anges n°52 , avril 2004.
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