Ce roman autobiographique pose l’importante question du concept de liberté dans un ancien pays colonisé : l’Angola des années 80. L’auteur démontre de manière habile le poids que représente une indépendance chèrement acquise que son pays ne sait comment appréhender. Qu’est-ce qu’un pays libre ? semble interroger Ondjaki, que signifie pour l’Angola être libre après la colonisation portugaise ? Certes, on ne trouvera pas de réponse dans ce roman mais Bonjour camarades lève le voile sur un malaise profond du post-colonialisme africain.
La mise en scène littéralement théâtrale de la fête internationale du travail, l’existence de factions armées fantomatiques ou invisibles (le Cercueil vide) soulignent une réalité de violence et de misère politique et sociale qui crée une paranoïa ambiante et arrange bien les affaires du pouvoir en place. Un pouvoir fantoche à la solde des « camarades » soviétiques, ces derniers apparaissant comme les véritables instigateurs de la nouvelle république populaire angolaise. Vue à hauteur d’enfant d’un milieu plutôt privilégié, la situation dans la capitale Luanda est tragi-comique. Dans une langue alerte et savoureuse aux phrases vrillées, l’auteur truffe son texte d’anecdotes croustillantes et drôles de la vie quotidienne du jeune collégien. Ce sont elles qui dénotent systématiquement l’absurdité et les contradictions d’un fonctionnement politique et idéologique implacablement voué à l’échec. Bonjour camarades est le constat d’un pays qui cherche son propre mode d’emploi à l’endroit où il ne le faut peut-être pas : « Comment est-ce qu’on va faire des élections puisqu’en Angola il y a juste un seul parti et un président… »
M.P.
Bonjour camarades de Ondjaki
Traduit du portugais par Dominique Nédellec
La Joie de lire, 206 pages, 9 €
Jeunesse Paranoïa post-coloniale
juin 2005 | Le Matricule des Anges n°64
| par
Malika Person
Un livre
Paranoïa post-coloniale
Par
Malika Person
Le Matricule des Anges n°64
, juin 2005.