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Histoire littéraire Thomas le païen

mai 2007 | Le Matricule des Anges n°83 | par Françoise Monfort

Dans un décor sombre battu par les vents, Thomas Hardy met en scène les passions contrariées et le poids des traditions à l’époque victorienne.

Retour au pays natal

La palme de la célébrité a beau revenir au Yoknapatawpha de Faulkner, il n’en reste pas moins que la littérature possède son lot de comtés imaginaires. Celui de Thomas Hardy, le Wessex, correspond aux territoires situés à la pointe occidentale de l’Angleterre. Lui-même ayant vu le jour dans le Dorset put étudier à loisir la faune et la flore de la lande, personnage à part entière qui fait l’objet du premier chapitre de son roman. « Cette lande impassible qui, depuis le commencement des siècles, défiait les catastrophes et dont les traits couturés et antiques réduisaient à l’insignifiance les plus sauvages tumultes d’un cœur humain ». Regard de naturaliste mais aussi de poète cultivé par une mère épouse de maçon mais férue d’auteurs latins et nourrissant de grandes ambitions pour son aîné. De ses premiers pas dans l’architecture lui est restée une rigueur de construction que l’on retrouve dans ses écrits. Unité de lieu la lande donc dont il dresse une carte pour illustrer sa première édition en 1878. Unité de temps une année imparti à trois hommes et trois femmes, six piliers soudés les uns aux autres pour soutenir la progression d’un récit à coup de machinations, de quiproquos et de revirements selon le rythme du mécanisme des dominos.
Le corps imprégné de sanguine qu’il vend aux paysans pour marquer leurs moutons, « L’homme au rouge » avance lentement sur la route. Sa roulotte brinquebale dans les ornières tandis que des feux s’allument aux quatre coins de la lande pour fêter le seuil de l’hiver selon un rite celte remontant à la nuit des temps. La silhouette de la belle Eustacia se détache au loin sur un tumulus. Ses « yeux païens, pleins de mystères nocturnes » et « d’orages » contemplent ce paysage sombre battu par les vents qui lui sert de prison. Elle croit aimer Wildeve, homme sentimental victime de ses pulsions en passe d’épouser Thomasine. Son regard se détourne cependant de son ancien amant, attiré par Clym Yeobright fraîchement rentré de Paris où il s’est adonné au commerce des pierres précieuses. Eustacia et Clym se marient contre l’avis de la mère de ce dernier qui en mourra de dépit. Plus isolée que jamais dans son cottage, il faut à peine six mois à la jeune femme pour recouvrer sa lucidité d’autant que son mari, victime d’une maladie qui lui ôte peu à peu la vue, s’est recyclé en coupeur d’ajoncs avec une joie de pénitent. Voyant ses rêves de promenades sur les grands boulevards définitivement laminés, elle confie son désarroi à Wildeve en regain d’amour depuis qu’elle appartient à un autre. Mais l’homme « couleur de sang » guette dans l’ombre, joue son rôle de messager du destin tout en veillant au bonheur de Thomasine qu’il convoite depuis toujours.
On pense évidemment à Madame Bovary. Thomas Hardy n’est pas loin dans son étude de la psychologie féminine vue sous l’angle de l’hystérie qui passionnait Freud à la même époque. Il lui fut beaucoup reproché à travers ce roman : trop de références à la France ; trop de similitudes avec Hugo, Flaubert bien sûr. Pas assez de commisération envers les paysans dont il tentait de reproduire le langage au plus près, la mode étant davantage à la gentry qui savait se montrer si généreuse envers ses gens. Treize ans plus tard, on condamna sa sympathie envers la fille perdue qu’était Tess d’Uberville. Puis, écœuré, en 1896 il renonça définitivement au roman pour la poésie suite au scandale provoqué par Jude l’Obscur et ses allusions sans détours au sexe. « Dans un monde où agir signifie se marier, où la communauté est faite de mains et de cœurs unis » il n’était pas bon de mettre en doute le sacrement du mariage et la position de l’homme tout puissant. L’erreur de Hardy fut sans doute de ne pas avoir été suffisamment victorien.

Le Retour
au pays natal

Thomas Hardy
Traduit de l’anglais par Marie Canavaggia
José Corti
437 pages. 21

Thomas le païen Par Françoise Monfort
Le Matricule des Anges n°83 , mai 2007.
LMDA papier n°83
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