Le roman s’ouvre comme une farce gargantuesque : le petit monde lisse et brillant de nos écrans télés se retrouve autour d’une table pour se faire proprement lécher le derrière par notre narrateur, Balthazar. Il dresse derrière chaque croupion le portrait féroce du léché. « Je m’attaque à la Carlan (…) rien n’est plus abominable que de fouiller le derrière d’un varan. Ca va être de la lèche syndicale. Je vais fouiner dans les faubourgs en pensant aux beaux quartiers. » Voilà décliné en plusieurs tableaux le trou par lequel Balthazar voit le monde, un œilleton sans concession, qui ne sent vraiment pas bon. Lassé d’être le joujou sexuel d’un obèse producteur, notre rouquin l’occit et trouve dans les bras d’Egon, un bel Autrichien, la fuite rêvée. Le meurtre devient le pivot structurel du livre, qu’il divise en un Avant et un Après, un Paris et un Vienne, ville où le héros atterrit. Mais point de Sissi à l’horizon : un ménage à trois, avec Egon et Vera, et un pays sur le déclin prêt à sceller un pacte avec le diable. Récit d’anticipation ? Roman futuriste ? Blaise Gauquelin détient la plus fourchue des plumes et la guide sans détours dans les noirs recoins de nos sociétés. Et son Balthazar a tout d’un Belzébuth, prêt à tous les compromis pour accéder à la tranquillité. Alors, quand dans les bras d’un dictateur charismatique, l’Autriche danse la valse du despotisme absolu, le jeune homme courbe volontiers l’échine : les premiers pas sont ceux de l’omniprésence médiatique du toujours bronzé Chancelier, le contrôle permanent aux frontières, les tests ADN appliqués aux rares étrangers autorisés à rester sur le territoire, « L’Autriche on l’aime ou on la quitte », la fin des subventions aux associations, le travail au mérite, « Fini l’argent facile ! »… Satirique, le premier roman de Blaise Gauquelin est de salubrité publique.
Petit et méchant de Blaise Gauquelin
L’Altiplano, 252 pages, 17,50 €
Domaine français Le Bodanubleu
octobre 2007 | Le Matricule des Anges n°87
| par
Virginie Mailles Viard
Le Bodanubleu
Par
Virginie Mailles Viard
Le Matricule des Anges n°87
, octobre 2007.