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Théâtre Méandres humains

avril 2009 | Le Matricule des Anges n°102 | par Laurence Cazaux

Le talentueux dramaturge espagnol Juan Mayorga voit le monde comme un immense jeu de manipulation. Double parution.

Le Garçon du dernier rang

Juan Mayorga a un parcours singulier. Né en 1965, il a d’abord été professeur de mathématiques et de philosophie dans un lycée de Madrid. Avant d’enseigner, depuis 1998, la dramaturgie et la philosophie à l’École royale supérieure d’art dramatique, toujours à Madrid. Et d’écrire pour le théâtre. Peu d’auteurs ont, comme lui, le pouvoir de vous happer dans la fiction. On se retrouve en tant que lecteur à la période des grandes découvertes, lorsqu’on dévorait le théâtre complet de Tchékhov sans pouvoir s’arrêter de lire. Il y a un même plaisir à plonger dans l’œuvre de Mayorga. Et comme les Solitaires intempestifs viennent de publier simultanément deux traductions de l’écrivain, le plaisir est double.
D’un texte à l’autre, les sujets abordés par le dramaturge sont d’une extrême diversité. Pour La Tortue de Darwin, la proposition est surprenante. Une vieille femme, Harriet, se présente dans le bureau d’un professeur en train de corriger les épreuves de son Histoire de l’Europe contemporaine. Harriet lui révèle quelques inexactitudes dans ses précédents écrits, comme dans l’affaire Dreyfus, la bataille de Verdun ou encore lors du bombardement de Guernica. Les sources de son savoir proviennent du fait qu’elle a été témoin, selon elle, de tous ces événements. Elle se présente comme la tortue de Darwin, devenue humaine à cause d’une évolution accélérée. À l’approche de ses deux cents ans, elle propose au professeur un marché : lui révéler la véritable histoire des deux siècles passés en échange d’un billet pour les Galapagos, où elle voudrait mourir. Juan Mayorga s’amuse à imaginer quelques impostures de l’histoire officielle et ce, depuis Karl Marx, en partant du point de vue d’une tortue, forcément très terre à terre. La pensée nous effleure que remonter ainsi le cours de l’histoire ne va pas être forcément palpitant, théâtralement parlant. Et pourtant, la figure de cette tortue devenue femme, à la mémoire trop lourde, fonctionne comme un masque. Elle révèle notre manque d’humanité, nos trahisons et nos mensonges. La pièce s’emballe de façon réjouissante, chacun des personnages voulant profiter à sa manière d’Harriet, comme phénomène scientifique, bête de foire ou de music-hall. Une jolie fable philosophique.
Quel sens ethique a l’acte d’écrire ?
Le deuxième texte, Le Garçon du dernier rang est, selon son auteur, une mise en scène de l’écriture. Un professeur de lettres, plutôt désabusé face à la médiocrité ambiante, est séduit par les dissertations d’un de ses élèves, Claude. Ce dernier a choisi la famille d’un camarade de classe comme terrain d’observation, lui rendant visite sous prétexte de donner des cours de maths à son camarade. À chaque nouvelle rédaction, Claude livre un peu plus de l’intimité de cette famille bourgeoise, décortiquant ses dysfonctionnements et ses médiocrités. Passant outre le voyeurisme et la manipulation, le professeur se prend au jeu de vouloir faire progresser l’écriture, devenant à son tour sujet d’étude de Claude. La relation entre le jeune homme et son professeur est complexe, un mélange d’attraction, de volonté de transmission, mais aussi de domination. Cette pièce questionne. Doit-on rester fidèle à ce qu’on voit ? Quelle transformation subit la réalité dans un acte artistique ? Quel est l’acte d’écrire, quel sens éthique a-t-il ? Quelles sont les frontières entre fiction et réalité ?
L’écriture de Mayorga est tonique, drôle, intelligente, nous donnant à regarder le trouble, l’angoisse et le désarroi de notre monde. Du grand art !

* Le Garçon du dernier rang est à l’affiche jusqu’au 12 avril au Théâtre de la Tempête à la Cartoucherie de Vincennes dans une mise en scène de Jorge Lavelli.

Juan Mayorga La Tortue de Darwin traduit de l’espagnol par Yves Lebeau et Le Garçon du dernier rang, traduit de l’espagnol Dominique Poulange et Jorge Lavelli, Les Solitaires intempestifs, 78 et 96 pages, 10 et 11

Méandres humains Par Laurence Cazaux
Le Matricule des Anges n°102 , avril 2009.
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