À l’extérieur d’un immeuble du Marais, à Paris, aucune indication de la maison d’édition. Les bureaux exigus de 13e Note sont partagés avec une agence de design. Pas assez de chaises ni d’espace pour discuter, alors Éric Vieljeux propose d’aller prendre un café. Il a la cinquantaine et, même si aujourd’hui il est, à mi-temps, éditeur par passion, il dit ne rien connaître au métier. Difficile de le croire. Certes, il vient d’un autre domaine d’activité, le transport maritime, mais quand il s’est lancé dans l’aventure, en 2008, il a su s’entourer d’une belle équipe : la directrice éditoriale, Sandrine Belehradek, et des directeurs d’ouvrages comme Patrice Carrer et Gilles de Bure. Et puis, il faut voir la qualité du catalogue papier qu’il vous met entre les mains. On y sent l’amour du métier, le plaisir du livre, tant l’esthétique (typographie, qualité des photos) que le contenu. L’intitulé de la maison y est suivi de l’accroche : « auteurs extrêmes sous haute tension ». Patrice Carrer s’en explique dans une présentation des catégories d’auteurs qui constituent le catalogue, les situant dans l’histoire littéraire américaine récente. Place donc aux néo-beats, méta-réalistes et indépendants, voire une quatrième catégorie pour les textes qui flirtent avec le polar ou les témoignages d’expériences de prison. Ça a le mérite de donner une vision claire de la ligne éditoriale. Et comme si ce n’était pas suffisant, 13e Note a publié fin 2010 un important volume anthologique, Le Livre des fêlures, autre vitrine où l’on retrouve une bonne partie des plumes maison : Mark SaFranko, Tony O’Neill, Richard Burgin… Une « écriture libérée des contraintes formelles du bon goût, (…) liée à un mode de vie marginal et potentiellement autodestructeur dont elle rend compte avec un souci d’authenticité », voilà ce qui réunit, bien souvent, tous ces auteurs. Jerry Stahl, Tim O’Brien, Tom Grimes, William Burroughs Jr et bien sûr Dan Fante et Barry Gifford, les deux piliers de 13e Note, Éric Vieljeux les a d’abord lus en anglais. Nombre d’entre eux étaient délaissés par les éditeurs français. Et puis, comme il l’a relaté ailleurs, il a fait le business plan à l’envers : « dès que j’ai su combien d’argent je pouvais perdre, pendant combien de temps, je me suis lancé ! ».
En un peu plus de deux ans, 13e Note a livré une trentaine d’ouvrages « bruts de décoffrage », où toutes les descentes aux enfers se côtoient (drogues, alcool, violence, sexe), où la face sombre de l’Amérique vient vous prendre à la gorge pour ne plus vous lâcher, avec comme un air de jazz, de blues ou de punk grinçant qui vous bourdonne aux oreilles. Et puis enfin, comme une petite lumière au bout du tunnel : la vie toujours là, tant que le sang palpite dans les veines…
Quelles références littéraires aviez-vous en tête en créant 13e Note ?
J’ai commencé mes lectures comme tout le monde par les classiques français, mais rapidement je suis passé à la littérature du voyage, qui...
Éditeur Coup de poing américain
juillet 2011 | Le Matricule des Anges n°125
| par
Lionel Destremau
Underground, autobiographie noire, transgression : 13e Note éditions rassemble les romans offstream et les textes « à la marge » de la littérature anglo-saxonne.
Un éditeur