En 2000, François Salvaing faisait paraître Parti, roman douloureux sur la chute des idéologies, écrit en prenant comme personnage un alter ego, Frédéric Sans, journaliste comme lui et comme lui communiste, mais devenu impotent à la suite d’un accident de santé. Avec Un amour au pied du mur (titre qui va au livre comme un verre de coca avec un bon foie gras), l’écrivain revient sur le moment où l’effondrement du bloc communiste signait l’échec d’un engagement politique sacerdotal. Cette fois, il prête à Gilbert Bessou des traits qui appartiennent à Salvaing François. Gilbert Bessou travaille à « Fabien », à la direction du PC, où, bien avant que le mur de Berlin ne s’effrite, il a senti ses convictions s’ébranler. Sa femme, comme lui mais avec plus de force, milite. Ils ont un fils qui reviendra d’un voyage à l’Est aux bras de Renate, une fille de RDA, belle et fantasque, forme vivante d’une réalité qu’on s’est longtemps cachée, place du Colonel-Fabien. Aux troubles politiques que provoque l’arrivée de Renate dans la maison du couple, s’ajoute en écho physique le trouble sensuel que la belle provoque chez Gilbert. L’homme est traversé à la fois par une Histoire qui nie la validité de son engagement et un désir qui précipite la crise qui couvait. À la fois carnet fictionnel de l’automne 1989 et tentative d’exploration d’un gouffre intime, Un amour au pied du mur désigne nettement un moment de fracture. Dans la vie de Gilbert, mais aussi, on s’en doute, dans celle de l’auteur lui-même. Même s’il recèle quelques bonheurs d’écriture, le roman maintient une tonalité grave et triste, quelque chose qui ressemble au désespoir. Comme un inventaire avant liquidation. Celui d’un monde qui, désormais, n’aura plus cours.
T. G.
Un amour au pied du mur
François Salvaing
Écriture, 200 pages, 17,95 €
Domaine français Un amour au pied du mur
octobre 2012 | Le Matricule des Anges n°137
| par
Thierry Guichard
Un livre
Par
Thierry Guichard
Le Matricule des Anges n°137
, octobre 2012.