Jon Kalman Stefansson, l'Islande au cœur
Invité, avec bon nombre d’autres écrivains nordiques, au festival Impressions d’Europe à Nantes en novembre dernier, Jón Kalman Stefánsson est venu précédé d’une bonne nouvelle : les éditions Gallimard annonçaient la publication du troisième volet de sa trilogie, commencée avec Entre ciel et terre, pour le début de cette année. Le Cœur de l’homme, qui paraît donc ce 10 janvier, est très attendu des lecteurs des deux premiers opus des aventures glaciales du « gamin », ainsi que se fait appeler le héros au cœur pur qui manque dix fois de périr gelé dans les deux premiers romans traduits en français. Détendu et souriant, le romancier ressemble à ses personnages : d’une humilité courtoise, attentif à ses interlocuteurs, il n’aura eu de cesse d’encourager son auditoire à lire régulièrement de la poésie…
L’homme est né à Reykjavik, « au plus noir de l’hiver », en décembre 1963. Il vit les douze premières années de son existence dans un immeuble du quartier de Safamýri, « lequel à l’époque grouillait d’enfants et de vie ».
« En l’espace de quelques mois, l’astronomie et l’ensemble de l’univers ont cédé la place à l’écriture et à la poésie. »
Son père est maçon, sa mère femme au foyer. « Elle était issue d’une famille d’artistes », notamment du côté de la grand-mère maternelle. Une famille de musiciens célèbres, dont la chanteuse d’opéra la plus connue d’Islande qui « s’est produite dans la plupart des opéras d’Europe ». Du côté du grand-père maternel, quelques poètes dont l’un des plus grands du siècle dernier, et l’un des pionniers du modernisme en Islande. « Pour sa part, ma mère jouait de plusieurs instruments, chantait dans une chorale ambitieuse, composait des poèmes, écrivait des nouvelles. Mais elle est décédée jeune, à peine âgée de 30 ans, au terme d’une pénible maladie. » Le père se remarie avec une femme qui vient « de la province des Strandir où le temps s’est arrêté vers le milieu du XIXe siècle ». (Les Strandir sont le lieu le plus reculé des fjords de l’Ouest, ndtr)
Jón Kalman grandit auprès de quatre frères et sœurs, « mais seulement l’un d’eux est du même père et de la même mère. Je suis tout à la fois : le plus jeune de mes frères et sœurs, le second plus âgé et le plus âgé. C’est assez complexe. Par exemple, le plus âgé de mes frères et sœurs n’a aucun lien du sang avec les deux plus jeunes. » Sa mère s’intéresse aux arts et à la philosophie, comme le faisait toute sa famille : « la sœur de ma mère a, par exemple, traduit Søren Kierkegaard. Mais j’ai plus ou moins perdu tout contact avec cette branche au décès de ma mère. »
L’enfance et l’adolescence se déroulent donc sans qu’on ne parle à la maison ni d’art, ni de littérature ou de philosophie, « et les questions politiques étaient très rarement abordées, autant que je me souvienne, à moins que cela ait échappé à mon attention. Mon père était occupé par son métier de maçon et par le bridge, il était excellent joueur de bridge. Quant...