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A la fenêtre Épuisement

avril 2015 | Le Matricule des Anges n°162 | par Marie Cosnay

On est après l’élection de Jacques Chirac, mai 2002, dans le métro les gens se sourient, on se rend compte de ces choses-là quand on est parisien d’occasion, dans le métro les gens se soutiennent moralement, c’est que nous avons eu peur. Nous nous sommes fait peur puis nous avons réagi, la réaction hélas accoucherait d’une souris, comme on sait, puis la souris deviendrait montagne et quelle triste montagne.

2007 et l’identité nationale, la montée organisée de la haine xénophobe, cette montée de haine n’est pas vague, elle s’explique, il faut reprendre le travail qu’a fait alors le collectif Cette France-là, qui a étudié le temps d’un quinquennat les discours et les actes d’un président, de ses ministres et de ses préfets, la montée de la haine xénophobe (comme l’apogée de la cupidité – détournements de fonds publics, comptes offshore, financements occultes de partis) n’a rien de fortuit. Elle est mise en place, sans doute dans un but à court terme et très certainement elle est sans idéologie. Elle a tout un tas de responsables mais parmi tous l’un est plus responsable, le plus responsable a un nom : Nicolas Sarkozy.

2012 il aurait fallu un travail de fond incroyable, un virage symbolique pour remédier à la montée de cette haine xénophobe. Nous croyions la chose possible, nous parlions de président normal – ce qui disait quelque chose de l’anormalité vécue jusque-là. Et puis nous avons oublié l’anormalité. Parce que si déçus, si blessés. Ce que nous risquions, étourdis par les cinq années précédentes et aspirant à un peu de calme et un peu moins attentifs, ce que nous risquions, nous le savions pourtant : c’était 2017, c’était les résultats intermédiaires, européens, municipaux, cantonaux et ce que nous risquions c’était pire que des résultats, c’était la montée de l’ambiance xénophobe, c’était la haine – tant les discours précédents (avec lesquels hélas un ministre de l’intérieur du Parti socialiste ne rompait pas) avaient désigné les responsables du marasme européen, tant on nous avait raconté une identité nationale attaquée, tant nous sommes des êtres de récit et d’imaginaire et tant l’imaginaire servi était constipé et agressif.

Dans le même temps, ou presque, nous voyions des peuples réagir, tenter de réagir, les peuples étaient écrasés par les institutions européennes dont la construction ou l’établissement se croyait en danger – et comment dire que nous les laissions se débrouiller dans le danger, que certains, même, trouvaient plus intéressant de voir venir la catastrophe, la rupture, pensant que quelque chose, au moins, de la catastrophe, surgirait.

Dans le même temps, Eric Woerth, qui avait aidé à financer la campagne de l’homme par qui la haine xénophobe avait explosé (l’homme qui avait imaginé un ministère de l’identité nationale et joué à qui mieux mieux à la haine xénophobe avec Guéant, Marine Le Pen, Copé, Hortefeux et cie), dans le même temps Eric Woerth, chargé du financement de la campagne de Nicolas Sarkozy et impliqué dans ce qu’on appelle l’affaire Bettencourt, dans le même temps Eric Woerth était jugé et le procureur demandait sa relaxe.
Dans le même temps, nous votions et comme surprise nulle surprise si ce n’est que nous nous montrions étonnés que le FN n’ait pas fait encore mieux qu’il n’avait fait, c’est dire si nous étions prêts, quand des candidats inconnus de nos cantons, la plupart d’entre eux débitant en réseaux des atrocités comme il est rare d’entendre quels que soient les cafés que nous fréquentions, réunissaient jusqu’à 20% des voix des votants, dans le canton où j’habite. Canton d’une ville qui aux municipales n’avait même pas pu monter une liste FN. Comme surprise aucune, puisque nous savions déjà et que nous étions prêts : soit que toute la classe politique nous le serinait, avec la mauvaise idée d’agiter un épouvantail absolu et républicain, soit que nous mesurions un peu le désespoir dans nos quartiers, dans nos campagnes et l’espérance que le FN, voilà où nous étions, faisait naître.

Et c’est alors, dans ces parages, un peu avant, un peu pendant, beaucoup après, qu’il revint. L’homme qui avait été à la tête de la montée de la haine xénophobe, remettait ça. Il regrettait, disait-il, une seule chose : avoir collé l’identité nationale au ministère de l’intérieur. Il expliquait qu’il aurait dû faire dépendre l’identité de la culture. C’est que votre culture est en danger, vous à qui il s’adresse. Pas à cause de lui, qui se demandait il n’y a pas très longtemps comment on pouvait lire les grandes œuvres du passé, mais, c’était sous-entendu, à cause des non-nationaux, de ceux qui empêchent qu’on s’identifie à soi-même.

C’est que personne ne lui a expliqué, à Nicolas Sarkozy, que les politiques sécuritaires en matière de langue et de culture font mourir les langues et les cultures, irrémédiablement ? Qu’une langue et une culture qu’on n’attaque pas ne sont plus vivantes ? Passons. Il continue, l’homme qui a fait flamber la haine xénophobe. La machine à intégrer est en panne, dit-il fort vulgairement. C’est la machine à assimiler qu’il faut inventer.

Qui lui explique que ça a été fait, déjà ? Qu’un des modèles de l’assimilation, c’est celui des Juifs dans l’Allemagne du début du XXe siècle ?

Épuisement Par Marie Cosnay
Le Matricule des Anges n°162 , avril 2015.
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