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Théâtre Mémoire vive

mai 2016 | Le Matricule des Anges n°173 | par Patrick Gay Bellile

Zyed, Bouna et Muhittin : oratorio pour deux enfants morts et un survivant.

Delta Charlie Delta

Le 27 octobre 2005, à Clichy-sous-Bois, trois enfants se réfugient dans un transformateur électrique pour échapper à la police. Ils ont 17, 15 et 15 ans. Deux mourront électrocutés, le troisième s’en sort avec des brûlures. À la suite de cette tragédie, les émeutes urbaines vont enfler dans les banlieues françaises pendant trois semaines. Affrontements avec la police, voitures incendiées, interpellations, ces événements feront pendant tout ce temps la une des médias et donneront lieu à de nombreuses polémiques. Deux policiers sont mis en examen dans cette affaire. Dix ans plus tard, le 18 mai 2015, ils sont définitivement relaxés et blanchis. Aujourd’hui, Michel Simonot publie Delta Charlie Delta, un texte qui reprend tous les détails de l’affaire et l’inscrit dans une histoire collective. Pièce chorale, poétique, Delta Charlie Delta s’intéresse d’abord au survivant. Celui dont on ne parle pas, mais que l’on interroge souvent, celui qui se demande pourquoi il a survécu et pas ses copains, pourquoi un banal retour d’un match de foot a basculé dans l’horreur. Les personnages sont nommés suivant leur fonction : voix des enfants morts, l’avocat, le chroniqueur, le survivant, l’expert, le jeune, etc. De nombreuses phrases dites par les uns ou les autres sont extraites des minutes du procès. Et les questions s’accumulent : pourquoi ces jeunes des banlieues ont-ils en permanence peur de la police ? Pourquoi se mettent-ils à courir lorsqu’ils l’aperçoivent ? Pourquoi les policiers se lancent-ils à la poursuite de jeunes dont l’enquête établira qu’ils n’ont rien fait ? Pourquoi laissera-t-on ces enfants près de quarante minutes dans le transformateur, sachant les risques qu’ils courent ? Pourquoi les mensonges ? Pourquoi les fausses accusations ? Pourquoi l’impunité ? Pourquoi faut-il qu’il y ait des morts pour que les questions soient posées ? Pourquoi ce message entendu sur la radio de la police : « ils sont en train d’enjamber le portail E.D.F, il faut ramener du monde, cerner le quartier, ils vont bien finir par ressortir, en même temps, s’ils rentrent sur le site, je ne donne pas cher de leur peau » ? Peut-on vouloir la mort de ces jeunes ? Peut-on les laisser mourir sans intervenir ?
Le texte de Michel Simonot est le récit, minute par minute, des événements, depuis le début de la course-poursuite jusqu’au dénouement final : « 18 heures 11 minutes 43 secondes électrocution de Zayed et Bouna durée de l’électrocution vingt-quatre secondes. » Il est aussi le compte rendu du procès des policiers, des questions qui leur sont posées et des réponses qu’ils apportent. Et puis dans les interstices, ce sont les voix des enfants qui se glissent, celles des enfants morts, mais aussi celle du survivant. Comme pour nous dire qu’au-delà du fait divers, ce ne sont pas deux morts de plus, deux Delta Charlie Delta (DCD), mais bien ces deux enfants-là qui ont disparu en cette fin d’après-midi du mois d’octobre, juste avant la rupture du jeûne qu’ils s’apprêtaient à faire au sein de leurs familles. Comment mettre des mots, et quels mots sur ces émotions, sur cette tristesse, cette colère qui s’emparent de nous au souvenir de ces événements et nous laissent désemparés. Le jugement du tribunal devait refermer définitivement l’histoire, la pièce de Michel Simonot la rouvre et la laisse ouverte. Les images s’envolent, les mots circulent, Muhittin Altun restera pour toujours le survivant face à la police, et le théâtre inscrira ce drame dans la conscience des humains : « un jour je me sens sur l’eau dans une barque / une rame brisée dans une main / l’autre devant mes yeux pour ne pas voir le soleil / je transporte les morts / je suis celui condamné à vivre après la vie / je suis parti loin de la cité de l’enfer je le transporte avec moi / personne n’est venu du dehors pour m’en faire remonter / tuez moi. »
Patrick Gay-Bellile

DELTA CHARLIE DELTA
de Michel Simonot
Espace 34, 120 pages, 16

Mémoire vive Par Patrick Gay Bellile
Le Matricule des Anges n°173 , mai 2016.
LMDA papier n°173
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