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Histoire littéraire Retour à Giono

juillet 2020 | Le Matricule des Anges n°215 | par Éric Dussert

Trois livres rendent à l’auteur de Colline ce qui lui revient. Avec des beautés inouïes parfois.

Lucien jacques - sourcier de giono

Il est toujours l’heure de lire Giono, mais on y est parfois poussé. Cette année, trois volumes tout frais y incitent sans vergogne et sans morgue, simplement, pressé par l’amitié de trois hommes qui furent des proches de l’écrivain : Alfred Campozet (1910-2003), maçon et marcheur, Lucien Jacques (1891-1961), graveur et « sourcier », Jean Carrière (1928-2005), impétrant romancier et prix Goncourt 1972 (L’Épervier de Maheux). Tous trois narrent à leur façon singulière la formidable geste de l’écrivain et de l’homme qu’était Jean Giono (1895-1970), en commençant par son ancrage au Contadour – puisque la Provence aura enchanté ses trois personnages leur vie durant.
Alfred Campozet, c’est un gars entier, à la Georges Navel indéniablement. Il ne voit que l’essentiel, et le travail ne lui fait pas peur. Il rejoint Giono dont il a entendu parler et rebâtit avec lui les murs qui sont tombés. Il intègre un univers et y existe. Son magnifique témoignage, édité en 1980 chez Fanlac passe pour le plus juste. Réédité avec un nombre considérable de documents nouveaux, une préface de Sylvie Durbet-Giono et un accompagnement d’Emmanuel Bluteau, il s’impose comme un document aussi exceptionnel que beau. Qu’on en juge par son seul abord, ce poème en prose qui impose l’attention : « Il est des chemins qu’on savoure, certains feutrés d’herbe, embaumés de menthe, d’autres souples au pas et d’une élasticité telle qu’on se sent par elle propulsé sans effort. D’autres ne sont que mince piste, si mince qu’on hésite parfois, se demandant s’il s’agit bien d’un sentier d’hommes ou d’une passe de sauvagine. Il en est d’allègres dont les cailloux chantent sous la semelle, d’autres parcourus d’eaux folles. Mais monter de Banon au Contadour, c’était trois heures de marche sur un chemin sans attraits. (…) Pas une ferme ni rien, cris de volaille, odeurs de foin, rien de ce qui les signale de loin, même quand elles se cachent dans la végétation, et fait au marcheur solitaire un petit signe d’amitié. A mi-route, on trouvait quelques champs de lavande et, sur un éperon isolé, les ruines d’un village depuis longtemps retourné à la pierre. Sans même l’éclat d’un fragment de vitre ou le sourire d’une tuile, sans même le bouillonnement de verdure qui ailleurs envahit le creux des maisons mortes, il n’était plus que chicots de murs, moellons descellés et prêts à rouler par l’éboulis vers le lit sec de l’ancien torrent. Cette mort totale faisait apparaître plus insolite encore une école coiffée de toutes ses tuiles, aux volets repeints de frais, plantée là toute seule et nue, sans un arbre, entre la route et les lavandes ». Qui résisterait à cet appel du maçon ?
Jean Carrière était beaucoup plus jeune lorsqu’il est entré en contact avec Giono. Il était décidé à écrire, et il a raison puisque le succès le coiffe vite. Il ne cessa de vouer à Giono admiration et reconnaissance, lui consacrant un essai riche où, détaché du passage consacré à L’Iris de Suse apparaît même la juste image d’un Giono gastronome au détour d’une phase : « Décapé de ses crasses par les vertus du grand air et apprenant à jouir de peu (les boîtes de maquereaux au vin blanc présentées par Giono comme le fin du fin restera un morceau de bravoure dans l’économie du bonheur) ».
Il faut se pencher enfin sur le grand complice de Giono, Lucien Jacques, son « sourcier », à travers le superbe catalogue préparé par Jean-François Chougnet et Jacques Mény pour l’exposition de l’œuvre du graveur, poète, tisseur et éditeur pacifiste qui a eu lieu à Marseille, au musée Regards de Provence – parallèlement à l’exposition Giono du Mucem. Il était naturel que son découvreur et premier éditeur, prolifique animateur, connaisse aussi l’hommage d’un siècle nouveau qui, tout en se débarrassant des poussières du précédent, fait briller les pièces essentielles de sa littérature passée.

Éric Dussert

Le Pain d’étoiles, d’Alfred Campozet
La Thébaïde, 190 pages, 20
Giono, de Jean Carrière
Préface de Serge Velay, Cahiers Jean
Carrière/Domens, 136 pages, 14
Lucien Jacques, le sourcier de Giono
Mucem/Actes Sud, 128 pages, 28

Retour à Giono Par Éric Dussert
Le Matricule des Anges n°215 , juillet 2020.
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