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Poésie Écrire et survivre

janvier 2021 | Le Matricule des Anges n°219 | par Emmanuelle Rodrigues

La poésie de Kimberly Blaeser atteste de l’étonnante résilience de la culture amérindienne.

Née en 1955 à Billings, dans le Montana, professeure d’université et intellectuelle engagée, Kimberly Blaeser représente une voix importante de la poésie américaine. Son œuvre prend en compte la culture des peuples amérindiens, et notamment, celle des Anishinaabeg dont elle est issue. Membre de la tribu Chippewa, elle a grandi dans la réserve de White Earth dans le Minnesota. Sensibilisée dès l’enfance à la culture orale que ses grands-parents lui transmettent, ayant appris la langue anishinaabeowin, elle a choisi d’écrire à la fois en anglais et dans sa langue tribale en le revendiquant, selon Béatrice Machet, traductrice et préfacière, en ces termes : « Tout être humain est un mélange, une conglomération aussi bien de langues que d’habitudes et d’influences. » Cette hybridation linguistique et culturelle, l’anthologie Résister en dansant nous la donne à découvrir pour la première fois en français.
Avec une extraordinaire liberté, l’écrivaine se réapproprie les mythes amérindiens et tout aussi bien l’histoire traumatique de la nation indienne, encore affectée par les biais culturels et le colonial gaze, le regard colonial. Anti-sonnet au sujet des rivières témoigne de la connotation raciste des termes péjoratifs encore usités dans la langue anglaise à l’égard des Indiens. Plus encore Quête du suffrage universel questionne le droit de vote : « Oh, notes dans les marges du doux hymne/ de l’égalité, les non-citoyens indigènes/ se tournent vers le congrès plus ancien du soleil  ». Dédiant son poème à un activiste amérindien, c’est bien à ses contemporains que l’auteure s’adresse : « Ne deviens pas bête descendue dans l’arène. Souviens-toi des mains indigènes qui tambourinaient, de l’homme qui se tenait calmement debout. » Principe de survie, la conscience du survival, au centre de la littérature amérindienne, Kimberly Blaeser la fait sienne lorsqu’elle déclare : « Les auteurs indiens sont très conscients d’être les héritiers des nations qui, soit ont disparu entièrement, soit ont été sur le point de l’extinction. »
En affirmant ainsi que sa propre voix « rassemble toutes les voix des gens de la communauté ayant vécu avant elle », on mesure à quel point son œuvre poursuit une « ballade de la continuation ». Encadrer sonde la manière avec laquelle la photographie d’une Indienne a été composée telle une nature morte, « souvenir sépia d’où la réalité est aspirée tel un filet rouge serpentant depuis un flacon d’encre fissurée. » En la nommant Ogichidaakwee, c’est-à-dire, une guerrière, ou encore une medicine woman au service de sa communauté, le portrait de cette femme acquiert une tout autre dimension : sa part humaine lui est restituée.
Enfin, il y a dans les textes de Kimberly Blaeser une poétique que la nature même lui insuffle. L’écrivaine célèbre le lien inaliénable qu’elle entretient avec la spiritualité que son peuple a scellée au cœur du vivant. Bien plus, Poème pour une planète en lambeaux qui envisage la catastrophe climatique en contrepoint de la destruction irréparable des peuples amérindiens, énonce ainsi : « nous habitons le Ish,/ naviguons grâce au fait de chanter des chansons. (…)/ Ici/ trouve le pouls d’une planète en lambeaux (…) Une offrande chantée./ Pour rapiécer les lambeaux./ Une question de survie./ De corrélation./ De vision. » Épilogue rassemble quelques vers d’une rare beauté : « Et si la mort est un changement d’être/ il est probable que l’action compte./ Et si la mort est une terre d’inconnu,/ peut-être faisons-nous bien de vivre avec incertitude. Et si la mort est une terre boisée,/ il serait bon d’apprendre les arbres. »

Emmanuelle Rodrigues

Résister en dansant
Kimberly Blaeser
Traduit de l’anglais (États-Unis) et préfacé par Béatrice Machet
Édition bilingue,
Éditions des Lisières, 86 pages, 17

Écrire et survivre Par Emmanuelle Rodrigues
Le Matricule des Anges n°219 , janvier 2021.
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