éditions Phi
Ouvrages chroniqués

Le Couteau dans l’étreinte
de
Laure Cambau
2007
C’est le deuil de la splendeur que mène Laure Cambau dans le recueil qui fait suite à Et le pourboire des anges ? (L’Amandier, 2005). En quatre parties - Des poissons dans l’âme ; Fumeurs d’arpèges ; Le couteau dans l’étreinte ; Par le trou du silence - dessinant quelque chose comme le cercle carré de (l’impossible) amour, c’est de la violence rayonnante de l’éros, de ses célestes flambées comme de ses lendemains ténébreux, qu’elle témoigne. Des vers travaillés par la force corrosive des instincts, la spontanéité primitive des élans, la saveur clandestine des humeurs. Une manipulation...

Et donc tout un roman
de
Jean Sorrente
La mémoire s’est figée et tous ces chemins empruntés, ces visages croisés en l’espace d’une vie, Jean Sorrente les restitue à la manière d’un réalisateur vidéaste. Crûment mais avec le filtre d’un conte de fées pour adultes. Un conte saturnien. Car comme Sorrente l’annonce en quatrième de couverture : « Écrire, c’est démélancoliser. C’en est ici l’exercice ». Or son livre est un paradoxe. Ce roman s’inscrit dans la lignée des essais et des textes philosophiques qui ont abordé la question de la mélancolie. Mais il distille sa réflexion de façon active en émaillant sa prose de portraits qui...

Figures du très obscur
de
Yves Namur
La quête de l’invisible, essayer de voir ce que l’on ne voit pas, entendre ce que l’on n’entend pas pour aller au-delà des choses. Tel est le chemin que nous propose Yves Namur (poète Belge né en 1952) dans son nouveau recueil de poèmes Figures du très obscur. Cette poésie s’offre à la réflexion philosophique avec une teinte de mysticisme : « ces longues branches de l’arbre/ Que je regarde,/ S’approchent-elles vraiment/ Des voix du Très-Haut ?/ Ou sont-elles simplement là/ Pour témoigner de l’éphémère/ Et de l’infinie beauté/ Du vent ? » Beaucoup de poèmes prennent la forme...

Monsieur Pinget saisit le râteau et traverse le potager
de
Lambert Schlechter
2018
Le rien, le nu, le perdu, Lambert Schlechter n’invente rien. Ils sont au cœur d’un temps cahotant et chaotique, d’une mélodie d’instants dont il fait des livres qui murmurent à notre oreille.
Allongeails et farcissures, c’est ainsi que Montaigne nommait les additions et gonflements successifs qu’il infligeait aux textes de ses Essais. Il y a de l’esprit et de cette façon de procéder, par aboutement et accumulation, dans l’entreprise qui est celle de Lambert Schlechter depuis 2006. Intitulée Le Murmure du monde, elle compte déjà cinq volumes auxquels viennent de s’ajouter un sixième, Monsieur Pinget saisit le râteau et traverse le potager (2017) et un septième, Une mite sous la semelle du Titien. Cette entreprise consiste à noter des détails, des trouvailles de lecture, des...
Mrs Haroy ou la Mémoire de la baleine
de
Jean Portante
Jean Portante est luxembourgeois. Mais il s’en est fallu de peu. Peu de temps d’abord pour qu’il ne soit italien tel ses parents, immigrés de la péninsule comme d’autres, beaucoup d’autres, son prénom alors serait resté Giovanni. Peu d’espace ensuite, car il suffit de rater l’arrêt du train à Differdange pour n’être plus au Luxembourg. Alors, Claude (ou Claudio), le narrateur du roman, de ces deux identités, de se trouver dans un pays où deux langues sont parlées, se sent comme les baleines, bénéficiant comme Moby Dick du don d’ubiquité : s’il est en Italie, il se rêve au Luxembourg et...

La Terre se tait
de
Anise Koltz
Hanté par la mort proche, le nouveau recueil d’Anise Koltz condense ses images pour ôter au silence ses derniers lambeaux de paroles.
Ne considèrez pas impertinent le fait de dire qu’Anise Koltz est une vieille dame. Cette Luxembourgeoise, née dans le premier tiers du siècle, nous avait donné à lire en 1998 déjà, un recueil de poèmes liés à la mort de son époux et à l’attente de la sienne propre. Le Paradis brûle (La Différence) surprenait autant par sa sérénité face à la grande faucheuse que par le soupçon jeté au langage et par la cruauté des relations familiales. C’est donc avec le sentiment de reconnaître un territoire qu’on lira La Terre se tait.
Divisé en six sections, le recueil s’ouvre par une mise en garde...