La rédaction Chloé Brendlé
Articles
Croire au noir
Deux ans après Ceux du noir, Marielle Hubert persiste en signant un deuxième récit âpre et perturbant sur sa mère et l’enfance incurable de celle-ci, Il ne faut rien dire.
Drôle d’adresse au lecteur à l’orée d’un livre que celle-ci : Il ne faut rien dire ! Plusieurs voix se battent dans ce titre, celle de la menace, celle de la peur, celle du défi aussi. C’est en tout cas, à l’heure d’après #MeToo, une injonction qui semble aller à contre-courant des témoignages qui se sont multipliés dans la presse (à propos de Matzneff, PPDA, Depardieu, tant d’autres) et dans les librairies (entre autres La Familia grande, de Camille Kouchner, Le Consentement, de Vanessa Springora et tout récemment, Notre silence nous a laissées seules, de l’actrice Judith Chemla). De...
Y’a d’la joie !
Toute de colère froide, Nathalie Quintane continue son décapage des discours sur la classe moyenne et montre comment la révolte ne vient pas.
Les classes moyennes ne font pas rêver. Il s’agirait même de les vomir une bonne fois pour toutes. C’était ce que proposait déjà Nathalie Quintane dans l’aussi bref que virulent texte « Le suicide des classes moyennes » dans le recueil d’essais Les Années 10 (2014). Mais on n’en finit pas d’en finir avec elles : « ectoplasmes rancuniers », « distributeur détraqué », « tsunami intersubjectif...
À corps perdus
Sous la forme d’un roman et d’une pièce de théâtre, Laurent Mauvignier propose deux façons de trouver sa voix, celle d’un adolescent en rupture de ban, Samuel, et celle d’une femme sans nom que plus rien ne semble toucher.
Écoutez, je vais vous dire, même si je ne suis pas sûre que vous m’entendiez, que vous compreniez – je suis même sûre que je pourrais aussi bien vous parler de n’importe quoi et que je parle dans le vide, c’est ça, n’est-ce pas ? » Ainsi s’adresse la « Femme » d’Une légère blessure à la jeune fille qui l’aide à préparer le repas de famille. De cette servante moderne, on ne sait rien,...
Marie Ndiaye par le menu
À travers la vie imaginaire d’une cheffe cuisinière, la romancière esquisse un autoportrait en trompe-l’œil et nous livre son art poétique : presque pas de dessert et beaucoup de salé, de la ferveur, de l’énigme et une joie âpre.
Joaillière, c’est l’un des métiers qu’aurait pu apprendre Marie NDiaye (ainsi aimait-elle à dire en entretien il y a quelques années), elle qui a si vite quitté les études pour se consacrer à son art, l’écriture. On l’imagine facilement en Précieuse du XXIe siècle, sertissant ses phrases, lentement, avec précise patience, tout en délicatesse – tout en cruauté, aussi. Avec La Cheffe, roman...
Marche ou rêve
Comment rêver dans une République soviétique finissante ? Elitza Gueorguieva ous embarque dans la tête d’une petite fille qui voulait devenir cosmonaute.
Ton grand-père est communiste. / Constanza est une peste. / Berlin n’est pas un homme. / Iouri Gagarine a été kidnappé par des extraterrestres. » L’héroïne du premier roman d’Elitza Gueorguieva n’a pas de prénom, elle a 7 ans, puis 14, elle vit les dernières années de la Bulgarie soviétique, n’a pas les yeux dans sa poche, mais plutôt vers le ciel, où elle compte bien suivre les traces du...