C’est à l’ombre d’un grand arbre de la pampa argentine -le malheur et la folie, paraît-il, s’abattent sur ceux qui s’y reposent- que se murmure ce récit au charme maléfique. Un vieil homme se souvient de quelques pensionnaires d’une estancia perdue dans ce bout de prairie « triste » et pleine d’« amertume » qui y ont bâti leur vie. Au bourdonnement du frelon et du vent parmi les feuilles, cet ancien gaucho évoque ces êtres simples, courageux, orgueilleux, indomptables, attendant, immuables, que leur destin se manifeste. Ici, c’est par le versant de l’infortune, de l’implacable tragique que les événements se bousculent. Le petit livre de cet écrivain anglais, né en 1841 et mort en 1922, a la beauté sauvage des horizons inamicaux. Aussi douce que le chuchotement d’une promesse bienheureuse, son écriture « s’élève jusqu’aux nues comme le faucon » pour retomber, vive et précise, frapper, comme par magie, cette contrée de son dépouillement ancestral.
Ombres
Traduit de l’anglais par
Arturo Orzabal Quintana
96 pages, 40 FF
Poches El Ombú
janvier 1998 | Le Matricule des Anges n°22
| par
Philippe Savary
Un livre
El Ombú
Par
Philippe Savary
Le Matricule des Anges n°22
, janvier 1998.