Caramel vert est un mot de passe qu’il est nécessaire d’énoncer clairement afin d’entrer dans une villa très protégée de la banlieue de Lima, au Pérou. Là, se trouve le repère d’un parrain local tel que l’on peut l’imaginer en Amérique du Sud. Aussi odieux que malin. Le jeune héros de Fernando Ampuero, Carlos, n’y entrera qu’une seule fois mais il y commettra l’irréparable sans l’avoir prémédité. La colère de ce jeune homme, réputé calme, y explosera comme un acte manqué.
Il faut dire que Carlos n’est pas du genre chanceux. Sans travail, il accepte de devenir cambiste aux coins des rues, un dealer de dollars au service de la mafia. Les valises de billets, portées par des cerbères en armes, passent devant ses yeux sans qu’il en soit vraiment étonné. Il intègre un travail qu’il pense semblable à un autre. Mais il croise un jour Mabel, une fille faisant elle aussi partie de l’organisation mafieuse. Il imagine que son amour soudain est réciproque. Carlos est alors au mieux de lui-même, on lui propose même de « l’avancement ». Le problème est que Mabel va susciter chez lui une forme abâtardie de la conscience de classe. Ils sont exploités et l’argent coule à flot à portée de mains… Ils pourraient partir tous les deux… Sans l’avoir vraiment voulu, le jeune homme va alors être entraîné dans un tourbillon qui le conduira à la rébellion et à une fuite éperdue qui lui réservera encore une ultime surprise.
Dans ce récit écrit à la première personne, dont le style alerte se met au service de l’histoire, Fernando Ampuero fait le portrait d’une société extrêmement dure dans laquelle un naïf tel que Carlos, même s’il est débrouillard, n’a pas sa place. Toute remise en cause d’un certain ordre établi par la toute puissante mafia conduit simplement à la mort. Dans une telle société, la seule issue possible selon Ampuero se situe chez ceux qui en sont totalement coupés, les rares Indiens qui vivent encore selon leurs traditions. C’est dans cette oasis idéalement humaniste que finira provisoirement le trop sympathique Carlos.
Caramel vert
Fernando Ampuero
Traduit de l’espagnol par
Ghislaine Delaune Gazeau
Éditions Métailié
134 pages, 45 FF
Domaine étranger La mafia elle aime pas ça
octobre 1999 | Le Matricule des Anges n°28
| par
Christophe Dabitch
Un livre
La mafia elle aime pas ça
Par
Christophe Dabitch
Le Matricule des Anges n°28
, octobre 1999.