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Théâtre Les démons en amont

mars 2000 | Le Matricule des Anges n°30 | par Maïa Bouteillet

Jeune auteur d’une œuvre conséquente, le Norvégien Jon Fosse est considéré dans son pays comme le nouvel Ibsen. On le découvre en France.

Quelqu’un va venir (suivi de) Fils

Écrivain du silence réputé ombrageux, Jon Fosse serait venu au théâtre par le hasard de la nécessité. On raconte que cet auteur -d’une quinzaine de romans, (seul Melancolia I est paru en français, chez P.O.L), récits, essais, recueils de poèmes et livres pour enfants - se trouvait vraiment sans le sou quand le jeune metteur en scène Kaï Johnsen a eu le remarquable flair de lui passer commande. Après Et jamais nous ne nous séparerons en 1994, suivront plusieurs textes de théâtre dont Le Nom, récompensé par la plus haute distinction de son pays (prix Ibsen) en 1996 et traduit en français par Terje Sinding, à L’Arche, avec L’Enfant.
C’est à l’occasion d’une mise en scène de Claude Régy, en octobre dernier, au théâtre des Amandiers à Nanterre, que l’on découvre aujourd’hui chez le même éditeur Quelqu’un va venir. Pièce d’une puissance essentielle, écrite au millimètre, à la manière d’une partition musicale, sur une trame très simple de deux cents mots à peine qui se répètent avec d’infimes variations. Tout se joue dans cet infime, dans l’espace ouvert entre les mots par la véhémence des répétitions. Le texte est écrit sans aucune ponctuation. « Elle : Maintenant nous sommes arrivés près de notre maison/ Près de notre maison/ où nous serons seuls ensemble/ Toi et moi seuls/ près de la maison/ où toi et moi serons/ seuls ensemble/ Loin des autres/ La maison où nous serons ensemble/ seuls/ l’un près de l’autre/ Lui : notre maison/ Elle : La maison qui est à nous/ Lui : la maison qui est à nous/ La maison où personne ne viendra/ Maintenant nous sommes arrivés près de notre maison/ La maison où nous serons ensemble/ seuls l’un près de l’autre ».
Plus les mots croient serrer au plus près la réalité, plus celle-ci glisse entre les lignes. Le doute s’insinue et laisse apparaître d’autres sens imprévus. Cette femme et cet homme qui viennent d’acheter une maison aux confins avec la mer pour horizon immense, afin d’être seuls tous les deux, c’est à la fois le bonheur absolu et l’horreur totale : la fusion, l’étouffement, la séparation d’avec les autres, le monde. Donc la mort. L’angoisse, la folie et la mort sont tapies derrière chaque mot. Le ressac des phrases -comme cette mer qui baigne la terre de Norvège, toujours présente chez Fosse- produit un effet d’hypnose métaphysique. C’est en cela particulièrement que Fosse est très proche de ces dramaturges du Nord de la fin du XIXe siècle, d’Ibsen évidemment (surtout les dernières pièces : Rosmersholm, Les Revenants, Quand nous nous réveillerons d’entre les morts) mais également du Belge Maurice Maeterlinck. Un univers où l’espace humain est perméable à l’étrangeté, aux fantômes du passé, où la mort marque la vie des vivants. Cette maison-tombeau, où le lit défait garde encore les traces du corps de la grand-mère récemment morte, ce jeune homme un peu fou qui leur a vendu la maison autour de laquelle il vient rôder comme un revenant, ces coups frappés à la porte, tout cela évoque les phénomènes énigmatiques des pièces de Maeterlinck. Il y a dans la simplicité du vocabulaire quelque chose de premier. On a parlé d’Adam et Eve pour Quelqu’un va venir. La pièce qui suit, Le Fils, où les personnages n’ont d’autres noms que Le Père, Le Fils, La Mère, souligne l’hypothèse biblique. Avec en plus Le Voisin pour manifester encore cet Autre dérangeant.

Quelqu’un va venir
Le Fils
Jon Fosse
Traduits du norvégien
par Terje Sinding
Éditions de L’Arche
144 pages, 85 FF

Les démons en amont Par Maïa Bouteillet
Le Matricule des Anges n°30 , mars 2000.
LMDA PDF n°30
4,00