Écrit à l’ombre d’Hiroshima et des fours crématoires Abattoirs 26 développe un abécédaire barbare et saccagé de la guerre, de la mort, des tortures et de l’horreur. Poésie malade, prose équarrie, staccato hargneux qui crache l’injure, dérape et bégaie son cri ; la langue de Raymond Bozier s’essaie bien parfois à décocher un rire lugubre, mais c’est alors un hoquet, comme un haut-le-cœur qui précède la nausée. Parce que « l’autre meurt en nous chaque fois que l’assassin commet son crime », et que notre siècle a atteint aux limites du dicible, le poème se confronte au cri, fouille son grenier à cauchemar, et comme en d’autres temps Les Tragiques, appose sur la page les éclairs hallucinatoires de l’Apocalypse. Logorrhée plus que poème, le texte appelle à être lu à haute voix, à être joué peut-être ou à se fondre dans un opéra violent et déchiré. Remarquablement édité, sous une couverture élégante, il est comme un serpent qui dort. Ou comme un monstre tapi au fond de notre crâne.
Pauvert
70 pages, 59 FF
Poésie Abattoirs
mars 2000 | Le Matricule des Anges n°30
| par
Thierry Guichard
Un livre
Abattoirs
Par
Thierry Guichard
Le Matricule des Anges n°30
, mars 2000.