Ça ne tourne pas rond dans la vie de Franck. Sa mère vient d’être internée dans un hôpital psychiatrique pour dépression nerveuse. « Folle, folle, folle ». Trois fois folle la mère qui débarque en plein cours de maths pour réclamer son fils en pleurant et en criant. C’est la honte, la colère, la violence qu’éprouve l’adolescent en lui et le mutisme face à son père là où les mots font cruellement défaut. C’est le règne du non-dit qui s’installe.
Pour se protéger de l’insupportable réalité, Franck crée la distance avec sa mère qu’il refuse d’aller voir et à qui il refuse de parler au téléphone. Une mère fantomatique, enfermée dans ce silence que Franck ne comprend pas, « un grand silence glacé, comme si la nuit était entrée dans la pièce ». Il n’y a plus de clarté, tout se brouille : le passé et le présent, la joie et la douleur, le bien-être et la maladie. Et puis explose : « Une gifle ratée, ça fait mal », dit Franck lorsque son père, excédé par l’obstination de son fils à ne rien vouloir entendre, s’en prend physiquement à lui. « C’est ta mère, tu entends et elle t’aime. Et moi, je l’aime, comme je t’aime. Elle est malade, ça arrive, et elle va guérir ». Dans l’espoir de cette heureuse issue, il faut inventer une nouvelle vie et affronter la réalité. Pour Franck, il s’agit d’accepter sa mère telle qu’elle est à présent dans sa maladie longue et difficile à soigner.
Avec Folle, Bernard Friot réussit un roman écrit tout en finesse et en touches nuancées. Dans un style sobre et dépouillé qui sert précisément un propos difficile, il décrit avec retenue le désarroi, la solitude, l’enfermement sur soi et parvient à faire que ce drame familial ne glisse jamais dans le pathétique.
Folle
Bernard Friot
Thierry Magnier
108 pages, 7 €
Jeunesse Le grand silence
janvier 2003 | Le Matricule des Anges n°42
| par
Malika Debaa
Le grand silence
Par
Malika Debaa
Le Matricule des Anges n°42
, janvier 2003.