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Histoire littéraire Les mots qui fâchent

mars 2004 | Le Matricule des Anges n°51 | par Éric Dussert

Des noms d’oiseaux, de singes et autres injures, Claude Postel en a fait provision au temps de la Réforme quand protestants et catholiques n’hésitaient pas à les échanger.

C’est un beau livre qu’a fourbi Claude Postel. On y apprend que les polémistes faisaient florès lors des farouches et sanglantes controverses religieuses de la Réforme (XVIe siècle). Seul l’aspect linguistique nous a retenu parce qu’il intéressera les amateurs de mots rares et de grossièretés choisies en leur montrant que cette tradition remonte à Rabelais, ainsi que celle du folklore obscène des enfants (C. Gaignebet). Vocabulaire forgé, répertoire animalier ou corporel, ici tout y passe : les flagitieux, les galafres et même les embabouineurs. Va donc, eh friandau ! On peut remercier Théodore de Bèze, Calvin, Jodelle et Manix qui nous ouvrent des horizons. Haddock peut aller se rhabiller, c’est un tout petit joueur.
Reste un constat : l’injure, l’invective et l’insulte imprimées sont menacées de disparition et nulle Société de défense de l’injure n’a encore vu le jour. Les juges en revanche n’y vont pas de main morte qui estourbissent sans coup férir les glissades lexicales et les traits pointus. Question de civilisation nous dit-on, et de respect de l’individu. Voir. Il est certain que les attaques ad nominem restent tout à fait inadmissibles lorsqu’elles sont racistes, religieuses ou physiques. Elles ont des conséquentes détestables. Néanmoins, il est loisible de penser que c’est affaire hypocrite que de condamner un vif esprit lorsqu’il a souligné en le ridiculisant l’enflure ou la bêtise d’un coquibus (cuistre) dans le cadre de sa fonction, quelle qu’elle soit. Raymond Cousse agonissant Bernard Pivot n’a pas mal fait et le triste Pivot pourrait avoir à prouver lui aussi et pourquoi pas ? qu’il n’est pas un critique à la manque. C’est pourtant de notoriété publique. A contrario, Marc-Édouard Nabe délestant son ire dans la divulgation d’anecdotes privées avec l’intention de nuire n’est jamais qu’un médiocre doublé d’un calomniateur.
Au fond, les mots se prononcent mais ne s’écrivent pas (jamais). C’est le principe hypocrite : il tolère le plus outrecuidant cirage de pompes en faisant mine de ne pas voir que ce dernier lèse évidemment ceux qui ne sont pas loués et devraient l’être. Il est des natures franches et tranchantes qui ne supportent pas ce faux savoir-vivre non plus que les faux-semblants et la « correction » politique. Toujours cette vieille question de l’être et du paraître. C’est un peu consternant. Aussi, peut-être pourrait-on réapprendre à se traiter mutuellement de babouins et d’ânes bâtés, cela ne coûte rien et profite à la sincérité, à l’honnêteté et à la rigueur, par conséquent à la dignité collective.
En guise de manuel pédagogique, la liste des injures certes un peu contondantes lancées par Léon Bloy à la face d’Émile Zola ne paraîtra pas avant l’automne (« Les têtes de turc », colloque des Invalides de décembre 2003). En attendant, lisons le Dictionnaire des mots qu’on dit gros de Robert Gordienne (Hors Commerce, 2002), Céline vociférant de C. Sautermeister (Société d’Études. céliniennes, 2003), le Bouquet d’injures et d’horions de J.-P. Arthur Bertrand et O. Cadet (Cent pages, 1999) et puis ce Traité de l’invective pour apprendre des mots fleuris, patinés comme des meubles anciens, bien respectables donc. Enguirlander en y mettant les formes, c’est bien. Faire preuve d’invention, c’est mieux.

Traité de
l’invective
au temps
de la Réforme

Claude Postel
Belles-Lettres
512 pages, 25

Les mots qui fâchent Par Éric Dussert
Le Matricule des Anges n°51 , mars 2004.