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Histoire littéraire Résigne-toi, mortel

avril 2004 | Le Matricule des Anges n°52 | par Éric Dussert

Romantique allemand, Karl Philipp Moritz a influencé Goethe et séduit Arno Schmidt par ses « grandes beautés poétiques », mais suscita un intérêt tardif de ce côté-ci du Rhin.

Andreas Hartknopf, allégorie est une authentique curiosité littéraire mais ce n’est pas seulement un livre étrange, c’est aussi le complément, ou l’autre versant, du grand roman autobiographique de l’Allemand Karl Philipp Moritz (1757-1793). Ami de Goethe, s’il vous plaît, cet étonnant personnage aura débuté comme apprenti chapelier et finira sa vie, éteint par la maladie alors qu’il occupait un poste de professeur d’archéologie à l’Académie des Arts de Berlin (1789).
Son œuvre aura mis tout de même deux siècles pour traverser la frontière puisque la toute première traduction de son grand roman autobiographique, Anton Reisen traduit par Georges Pauline n’a paru qu’en 1986 chez Fayard. Étrangeté du sort bien incompréhensible puisque cet écrivain polymorphe à défaut d’avoir été pléthorique a eu une influence certaine sur Goethe et Schiller et laissé des récits de voyages, deux romans dont cet Andreas Hartknopf, des essais d’esthétique partiellement fournis par Philippe Beck sous le titre Le Concept d’achevé en soi et autres écrits (PUF, 1995) et des ouvrages didactiques. S’il fallait une caution à nos dires, il serait aisé de reprendre cet argument proposé par l’annotateur précis et traducteur Michel Trémousa : Arno Schmidt lui-même qui s’y connaissait en écrivains négligés s’était pris d’affection pour ce livre étrange et s’en faisait l’écho : « Cette satyre géniale se passe de décryptage quant aux détails (…). Le livre est là, avec ses grandes beautés poétiques ».
Satyrique sans doute, allégorique peut-être aussi, Andreas Hartknopf est, si l’on en croit Michel Trémousa, le versant dépeigné d’Anton Reisen. Dépeigné ou bizarre, il est l’assemblage apparemment sans façon si ce n’est le vague ordonnancement du récit du retour d’un homme en son pays des réflexions d’une poignée de personnages autour des thèmes de prédilection de Moritz : la pédagogie (il est l’auteur d’un Nouvel Abécédaire, éditions Être, 2003), la philosophie, l’individu face au Léviathan, la musique ou la psychologie mais encore la franc-maçonnerie dont les références masquées émaillent le texte, tout comme les citations bibliques. Et l’on devine ici ce qui pouvait séduire Arno Schmidt dans cette manière cryptée.
C’est autour d’un alter ego, l’éponyme Hartknopf qui retrouve son vieux maître l’Émérite et son généreux cousin l’aubergiste Knapp que Moritz enroule le fil de sa pensée après avoir poussé Harknopf dans les pattes épaisses de deux grotesques et sournois « réformateurs du monde », Haguebrouck qui entend des voix et Sakristan l’ex-sacristain. Dans quelques scènes farces, ces deux-là se sont proclamés les éducateurs des jeunes enfants du bourg. Ce sont aux yeux de Hartknopf des « sophistes, les réformateurs du monde, les Haguebouck, tous ces songe-creux (qui) parcourent à grand bruit les régions enchantées d’un mieux qui n’existe pas, laissant pendant ce temps à l’abandon la terre réelle sur laquelle ils marchent et croissent les épines et les chardons ».
Anti-utopique, le propre discours de Moritz est foncièrement fataliste et c’est à propos de la mort qu’il fournit les pages les plus captivantes de ce Memento mori. Au pied du gibet de Gellenhausen et baigné par le quiétisme et le spiritualisme de son temps, Moritz développe un fatalisme profond dont le maître mot est « résignation ».

Andreas Hartknopf, allégorie
Karl Philipp Moritz
Traduit de l’allemand par Michel Trémousa
José Corti
180 pages, 16

Résigne-toi, mortel Par Éric Dussert
Le Matricule des Anges n°52 , avril 2004.
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