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Poésie Beat attitude

septembre 2004 | Le Matricule des Anges n°56 | par Catherine Dupérou

Dans une anthologie qui fera date, Gérard-Georges Lemaire retrouve les origines et les acteurs d’un des mouvements les plus novateurs du XXe siècle, la Beat Generation.

Beat generation

L’idée que l’on se fait de la Beat Generation tourne généralement autour des trois figures tutélaires de Jack Kerouac, William Burroughs et Allen Ginsberg. C’est oublier que ce mouvement est né au hasard de rencontres décisives, et d’une émulation créatrice partagée par des personnalités singulières. Gérard-Georges Lemaire en a connu les principaux acteurs et traduit ou préfacé certains des livres parus en France, notamment aux éditions Christian Bourgois. Revenant dans une préface en forme d’essai sur les circonstances qui firent d’une poignée d’individus « qui prennent leurs responsabilités et disent ce qu’ils ressentent vraiment » (A. Ginsberg) un groupe de Beatniks, il nous offre un choix de textes d’auteurs souvent introuvables en français (Gregory Corso, Peter Orlovsky, Carl Solomon, Herbert Huncke, Michael McClure, Gary Snyder, Bob Kaufman, Diane Di Prima, Philip Lamantia). À l’époque des revival en tous genres, une plongée dans les origines de ce mouvement qui bouleversa la littérature américaine est des plus salutaires.
En 1944, Kerouac vient de rencontrer Ginsberg qui lui présente Burroughs. Ce dernier connaît une petite frappe qui deale du côté de Times Square, Herbert Huncke, qui utilise une expression empruntée au jargon des jazzmen noirs pour dire qu’il est crevé : « beaten-down ». Kerouac s’en empare avec jubilation, gratifiant ce terme d’argot d’une connotation romantique : « pour moi, ça voulait dire être pauvre dormir dans le métro comme Huncke et cependant être illuminé et avoir des idées sur l’apocalypse et tout ça ». Être « beat » c’était aussi adopter l’attitude de « Bartleby solitaire contemplant la fenêtre murée de notre civilisation » (J. Kerouac). Mais la Beat Generation n’est pas encore née. Il faudra attendre décembre 1946 à New York, que Neal Cassady apparaisse sur le chemin de Kerouac, qui « voit en lui une sorte de paradigme du héros moderne, dépourvu de préjugés, instable, toujours en quête de quelque chose d’inaccessible et d’indéfinissable ». Influencé par la verve des lettres que lui envoie Cassady, il affine son style et fera de son ami le héros d’On the road, Dean Moriarty. Il faudra surtout attendre l’année 1955, et la rencontre entre Kerouac, Cassady, Ginsberg et les acteurs de la Renaissance de San Francisco, Whalen, McClure, Snyder et Lamantia. Ensemble ils organisent en octobre une soirée de lectures à la Gallery Six. Kenneth Rexroth mène la danse. Ginsberg lit Howl, dédié à Carl Solomon. Rien désormais ne sera plus pareil : « Dans nos souvenirs, personne n’avait été si éloquent en poésie avant lui nous avions franchi un point de non-retour et nous y étions préparés, à ce point de non-retour » (M. McClure). L’épisode parisien du Beat Hôtel de la rue Gît-le-Cœur où, en 1959, Burroughs et Gysin mènent de géniales expériences littéraires, cut-up et permutations, est également un moment charnière. Agrémentée d’un album de photos de Françoise Janicot, cette anthologie est une véritable épopée dans les paysages mentaux d’une génération légendaire.
Dans l’histoire de la Beat Generation, Lawrence Ferlinguetti occupe également une place cardinale. Né en 1919 à New York, il part en auto-stop au Mexique en 1939. Puis participe au débarquement sur les côtes françaises en 1945, et reste trois ans à Paris où il s’inscrit à la Sorbonne. En 1950 il s’installe à San Francisco, traduit Jacques Prévert et crée une revue nommée City Lights, en hommage au film de Charlie Chaplin. Puis ouvre en 1953, au rez-de-chaussée de l’immeuble qui abrite les bureaux de la revue, le City Lights Bookshop. Unique en son genre, la librairie promeut le livre de poche et présente au sous-sol un grand choix de publications anarchistes. S’inspirant de la collection « Poètes d’aujourd’hui » de Pierre Seghers, Ferlinguetti fonde en 1955 les éditions City Lights et propose des livres à moins d’un dollar.
Après avoir entendu Howl lu par Ginsberg à la Six Gallery le fameux soir d’octobre 1955, il publie le poème en août 1956, préfacé par William Carlos Williams. Cela lui vaut d’être arrêté pour publication d’obscénité et de faire la une des journaux. Un intérêt pour la poésie contemporaine va naître alors. En 1957, Howl se vend à plus de 100 000 exemplaires et son éditeur est acquitté. Il publiera aussi Kora in Hell de Carlos Williams, puis Gasoline de Gregory Corso. En 1959, il fait découvrir la voix unique de Bob Kaufman avec son Abomunist Manifesto. Sa poésie est inspirée de ses voyages et des événements politiques (Landscapes of Living & Dying, Tyrannus Nix). Blind Poet réunit dans un beau recueil bilingue des poèmes écrits après le 11 septembre, qui « tentent d’exprimer la profondeur de la colère et de la frustration des peuples » face à « l’arrogance et l’ignorance » de la politique américaine. Il nous y engage à prendre la parole « Ô majorité silencieuse/ Avant qu’ils viennent vous chercher ! » S’il ne s’est jamais considéré comme un Beat, Ferlinguetti reste aujourd’hui le dernier grand témoin et passeur d’une époque unique dans l’histoire de la littérature.

Beat Generation,
une anthologie
Gérard-Georges Lemaire
Al Dante
400 pages, 28
Blind Poet
Lawrence Ferlinguetti
Traduit de l’américain
par Marianne Costa
Maelström & le Veilleur
160 pages, 16
(en librairie le 11 sept.)

Beat attitude Par Catherine Dupérou
Le Matricule des Anges n°56 , septembre 2004.
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