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Domaine étranger L’éveil du désir

janvier 2005 | Le Matricule des Anges n°59 | par Lucie Clair

À la suite de « Mort de l’amour », le deuxième roman d’Oscar Van Den Boogaard déconstruit tous les arcanes d’une chevauchée fantastique des forces de vie.

Aux confins du Pajottenland, pays terne et flamand, les hommes sont balourds, ignorants et maladroits. Les hommes boivent un peu, jouent beaucoup, ou bien l’inverse, posent leurs mains sur la croupe de leurs femmes, comme sur la calandre de leur voiture, les hommes se toisent de temps en temps pour savoir lequel a mis la main sur la plus belle et ils pensent alors carrosserie, sans bien savoir à qui ils se réfèrent, à la femme ou au véhicule, chacune propre à entretenir la subtile rivalité qui alimente la vitalité des villages clairsemés. Julia les regarde, les étonne, les aime parfois, s’en détourne pourtant, bridée, aliénée de tant de routine, de si peu de fantaisie. Femme-enfant, déroutée par son mariage et ses grossesses la dernière, inaboutie, marquant le début d’un vaste basculement Julia règne sur ses désirs naissants avec des moues de midinette, sur lesquelles Oscar Van Den Boogaard nous offre un regard d’une tendre ironie. « Sortez toutes, petites madames, voici la présentatrice météo volante, les prévisions du temps pour aujourd’hui : les températures sont en hausse, je viens de relever le thermostat, pour votre plaisir, il va faire chaud, il va faire torride, vos cuirasses fondent, la nature se débonde, la nature sort de ses pores, de ses cages, limites, vêtements, répétez en chœur après moi… » Car tout démuni et médiocre que puisse être le terreau d’où surgit le désir, il n’en demeure pas moins, en jaillissant, l’ébauche d’une aube pour qui sait le reconnaître et en suivre l’élan. Julia ne s’y trompe pas, corpus delirum étant le passage obligé pour quitter cette terre fade et aller à la rencontre de l’inconnu, elle se laisse peu à peu glisser de caprices en fantasmes, aux antipodes de Maurice, mari aimé, aimant, prévenant et conformiste, jusqu’à Ipanema, plage luxuriante du Brésil où le jeune Marcello cristallise les exaltations et angoisses d’un port jamais atteint, enfin à portée de main. « Elle n’avait jamais rien éprouvé d’aussi fort depuis longtemps et elle n’avait jamais été aussi loin de chez elle, Julia voulait appeler des témoins, son fils, sa fille, son mari, Meryl, les religieuses de l’amour, pour que tous voient de leurs propres yeux que Julia était capable d’être heureuse, d’éprouver de l’amour, de se dépasser… tout ce qui était arrivé par le passé menait ici, toute sa vie n’était qu’un gigantesque entonnoir qui débouchait ici, en ce seul point auquel il était impossible d’échapper, les oiseaux retenaient leur souffle, les poissons retenaient leur souffle, tout retenait son souffle… ce seul point tournait à une vitesse folle… » Dans sa quête effrénée d’un bonheur extatique, Julia renoue aussi avec l’attente exacerbée de son enfance abandonnée, niée par des parents voyageurs et négligents, eux aussi aux antipodes et pour toile de fond de la frustration, Bruxelles, l’oncle Tom, mémé Vlezenbeek, le pensionnat et la grisaille.
Conte fantastique aux temps mêlés, aux voix démultipliées, Pollen ressemble à la matière douce-amère agrégée de ces milliers de petites boules duveteuses, légèrement irritantes, fortifiantes et croquantes butinées et transformées par les abeilles. La quintessence des fleurs arrivées à maturité, gorgées de soleil et de rêves de caresses. Et si le destin de Julia est de revenir au plat pays, lui reste pourtant cet éclat de l’été accueilli dans sa chair, la spontanéité touchante d’avoir reconnu et suivi une fois dans sa vie la force de son désir. Peu importe qu’on ne lui pardonne pas au village d’avoir écouté l’irrésistible besoin de se fondre en l’homme, de le fondre en soi, de faire corps. La petite boule de pollen précieuse et délicate est cette liberté effleurée qui ne sera jamais oubliée.

Pollen
Oscar Van Den
Boogaard
Traduit du néerlandais par Marie Hooghe
Sabine Wespieser
390 pages, 24

L’éveil du désir Par Lucie Clair
Le Matricule des Anges n°59 , janvier 2005.
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